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Avez-vous déjà entendu parler du phénomène de « réduflation », ou « shrinkflation » en anglais? Comme moi, vous n’aviez peut-être jamais vu ce terme, mais c’est clair en tout cas que vous l’avez remarqué à l’épicerie! La réduflation, ce sont les emballages de divers produits alimentaires et domestiques qui, tranquillement dans leur coin — et sans l’annoncer bien sûr, deviennent plus petits.
On le sait déjà, mais les aliments, comme beaucoup de produits de consommation en ce moment, sont soumis à une forte inflation (à des niveaux inégalés depuis au moins 35 ans).
Devant cette pression, les fabricants n’ont souvent que deux choix... C’est-à-dire, soit augmenter les prix, ce que les consommateurs ont tendance à remarquer immédiatement et à voir de manière très négative… Ou sinon, soit conserver les mêmes prix, mais réduire les formats.
Comme c’est le prix qui prime pour le consommateur, ce changement, habituellement plutôt « subtil » considérant que la forme, le logo ou le reste de l’emballage ne change pas, risque beaucoup plus de passer inaperçu. Et c’est là-dessus que se fient les compagnies qui produisent nos aliments.
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Vous l’avez peut-être déjà remarqué, mais il y a des catégories d’aliments qui se prêtent beaucoup plus que d’autres à la réduflation.
Des « aliments entiers » non-transformés, comme les fruits et légumes ou encore la viande, sont largement épargnés par ce phénomène. Ce qui ne veut pas dire qu’ils échappent à l’inflation, au contraire… Mais plutôt que pour ces aliments, le prix est plus susceptible de grimper que la quantité de diminuer, pour des raisons assez évidentes.
Il en va de même pour les œufs, qui se vendent par nombre (il serait bizarre d’avoir un paquet de 11!) et le lait, qui est sujet à une réglementation des prix.
Par contre, tout ce qui est transformé et qui vient dans un emballage peut être sujet à la réduflation. On peut même parler des produits ci-dessus qui, dans leurs formes les plus simples ne sont pas sujettes à cette pratique : fruits et légumes (congelés, assaisonnés, sous forme de frites), viandes (charcuteries, ailes de poulet, coupes assaisonnées et prêtes-à-manger), lait (aromatisé, sous forme de yogourt)…
Mais il y a aussi bien d’autre chose : les contenants de jus qui rapetissent, les paquets de fromage qui sont plus minces qu’avant, les boites de biscuits et de craquelins qui en contiennent moins, les condiments qui changent de format, les pâtes et les grignotines, les céréales…
Parallèlement, les produits non-alimentaires, mais connexes, vivent aussi le même phénomène : les produits de papier (absorbant, de toilette, mouchoirs) qui peuvent discrètement contenir moins de feuilles, le détergent à lessive, les produits nettoyants, la nourriture pour animaux aussi.
Le site de Radio-Canada recense un tableau fort instructif de quelques produits ayant subi une réduflation dans les dernières années, par exemple :
Le phénomène est mondial : le site Reddit par exemple compte un forum de discussion de plus de 17 000 membres qui publient chaque jour des exemples visuels de « shrinkflation » - et qui font vraiment réfléchir à l’universalité de la pratique.
Débourser le même prix pour une quantité moindre de produit, c’est carrément l’équivalent de… payer plus cher. C’est simplement que ce n’est pas formulé ainsi.
« Rapetisser les emballages, ça équivaut réellement à imposer une hausse de prix mais de manière plus insidieuse, » explique Edgar Dworksy, un avocat spécialisé dans la protection des consommateurs. C’est bien là le concept-clé derrière la réduflation : le fait que c’est pratiqué de manière insidieuse, en présumant que la plupart des gens ne s’en rendront pas compte.
Et en plus de réduire le poids et le volume des emballages, il existe bien d’autres tactiques de mise en marché qui participent au phénomène. Parfois, les emballages vont même être plus gros et non visuellement plus petits, même s’il y aura moins de produit dedans. Parfois, le bouchon ou le couvercle d’un produit devient beaucoup plus volumineux, ce qui laisse moins de place au contenu lui-même. Parfois, la forme des produits eux-mêmes (biscuits, barres de chocolat etc.) change pour devenir plus ronde ou avec plus de renflements, permettant ainsi littéralement de « couper les coins ronds ».
Disons que c’est étonnant la « créativité » que les fabricants peuvent démontrer pour mettre en place des pratiques dont le but est de passer largement inaperçu!
La réduflation n’est pas illégale tant que la quantité est bel et bien indiquée sur l’emballage, puisque l’information est indiquée et n’est pas trompeuse. Mais disons que tout le contexte autour de cette information peut se trouver dans une belle grande zone grise… Puisque la pratique repose sur plusieurs pré-supposés dont on peut remettre le côté éthique en question, par exemple le fait de présumer que les consommateurs ne se préoccuperont pas du format ou ne regarderont pas ces informations.
Dernièrement par contre, certains manufacturiers ont publiquement annoncé qu’ils mettaient en place de telles pratiques, ce qui était inédit dans cet univers où la réduflation, bien que généralisée, demeurait assez un sujet assez tabou. Ces compagnies, par exemple Ferrero (Nutella et produits chocolatés) et Mondelez (biscuits comme les Oreo, craquelins et autres grignotines) ont ouvertement expliqué que faisant face à des coûts de production plus élevés et ne souhaitant pas compromettre la qualité de leurs produits, elles n’avaient pas le choix [de préconiser la réduflation].
Les deux entreprises ont été louées pour leur transparence. Il est maintenant à espérer que d’autres feront de même, afin de renforcer leur lien de loyauté envers les consommateurs ainsi que la perception de confiance de ces derniers.
Comme d’habitude, le consommateur n’a pas de pouvoir sur le format ou le prix d’un produit en tant que tel; seulement sur le fait d’acheter ce produit ou pas. Si on tient absolument à ses produits favoris, il y a donc peu de marge de manœuvre pour éviter la réduflation.
Par contre, il est toujours possible (même s’il faut remarquer qu’il s’agit d’un fardeau qui revient toujours aux acheteurs et non aux fabricants) de noter les formats ainsi que le poids/le volume de certains produits susceptibles de subir de la réduflation, par exemple en prenant les emballages en photo. Ceci peut permettre d’être plus au courant des éventuels changements. S’il y a lieu, il est toujours possible de se tourner vers la compétition ou vers des produits de remplacement comme les marques maison.
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