Certains récits de vie donnent froid dans le dos, comme ceux de ces deux Américains, Wiley Bridgeman et Ricky Jackson, qui viennent de retrouver leur liberté après avoir passé 40 ans en prison pour un crime qu’ils n’avaient pas commis. 40 ans, c’est long, c’est très long, c’est le temps de passer de la jeunesse à la vieillesse et c’est le plus long temps d’emprisonnement injustifié de l’histoire.
Malheureusement, des erreurs judiciaires de ce genre, il y en a eu d’autres par le passé. Petit panorama de dix des pires erreurs qui ont coûté à leurs victimes innocentes plus de 20 ans d’emprisonnement.
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James Bain — 35 ans d'emprisonnement
James Bain est un Américain de la Floride qui en 1974, à l’âge de 18 ans, a été accusé et condamné à vie pour introduction par effraction, enlèvement et viol d’un écolier de 9 ans. Bain a déclaré dès le début qu’il était innocent, mais a réclamé en vain des tests d’ADN. En 2009, Innocence Project, un organisme sans but lucratif créé pour aider à exonérer des gens injustement emprisonnés, s’est penché sur son cas. Quatre ans plus tard, on a finalement pu démontrer, grâce aux tests d’ADN, que Bain ne pouvait être le coupable et il a été libéré peu après. James Bain a reçu 1,7 million de dollars en compensation pour cette erreur de la part de l’état de la Floride.
Étrangement, même après 35 ans de sa vie vécus en prison, James Bain n’était pas en colère au moment de sa libération. « Comment puis-je l’être ? a-t-il déclaré aux médias. On ne peut pas retourner en arrière ». Bain a même déclaré se sentir béni d’avoir vécu cette expérience, se comparant à Joseph, le personnage biblique qui a été emprisonné à tort avant d’émerger encore plus fort.
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Sakae Menda — 34 ans d'emprisonnement
Le Japonais Sakae Menda, né en 1925, est la première personne à avoir été relâchée du couloir de la mort au Japon après un second procès. Non seulement Sakae Menda a été emprisonné à tort pendant 34 ans, mais il a en plus passé ces 34 années dans le couloir de la mort à attendre son exécution.
Condamné pour deux meurtres en 1950, alors qu’il avait 25 ans, il n'a eu de cesse de clamer son innocence, jusqu'à ce qu'un nouveau procès le lave de tous soupçons en 1983. Son alibi, qui avait été ignoré lors du premier procès, a été reconnu valable.
Manda a reçu 90 000 000 yens (860 000 $) en compensation de la part du gouvernement et a offert la moitié de cette somme à un organisme consacré à l’abolition de la peine de mort.
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Mary Virginia Jones — 32 ans d'emprisonnement
Après 32 ans passés en prison pour avoir aidé (sous la menace) son petit ami de l’époque condamné pour avoir tué 2 personnes dans une ruelle, Mary Virginia Jones a été libérée en mars 2014, à l’âge de 74 ans. Elle est la seule femme à faire partie de cette triste liste d’erreurs judiciaires. Il aura fallu, après 3 procès en appel infructueux dans les années 1980, que des étudiants en droit de l’université de la Californie du Sud se saisissent de son cas pour que son dossier soit rouvert.
Les jeunes défenseurs faisaient partie d’un programme universitaire qui permet à des étudiants d’étudier des dossiers pénaux où les accusés estiment leurs droits constitutionnels bafoués. Les jeunes défenseurs ont fait valoir devant la justice que l’accusée avait agi sous la contrainte. À sa sortie, Mary Virginia a été reçue par ses 2 enfants, dont son fils qu’elle n’avait pas vu depuis 30 ans : il était interdit de visite à cause d’une toute petite ligne sur son casier judiciaire.
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Cornelius Dupree — 30 ans d'emprisonnement
En 1979, deux hommes ont attaqué un homme et une femme, les ont volés et ont amené la femme dans un parc avant de la violer. Ils se sont enfuis dans l’auto de leur victime après avoir pris son permis de conduire et son manteau en peau de lapin. L’auto a ensuite été retrouvée abandonnée près d’une épicerie où les deux hommes avaient tenté de vendre le manteau.
Dupree et un compagnon ont été arrêtés par la police non loin de la scène du crime et ont été accusés quand on a découvert que le compagnon de Dupree avait un pistolet sur lui. Le lendemain, la femme a identifié les deux hommes comme étant ses violeurs parmi plusieurs photographies tandis que l'homme n’en a reconnu aucun.
En cour, tous deux ont par contre affirmé reconnaître les deux accusés qui ont été condamnés à 75 ans de prison. Cornelius Dupree avait 20 ans. En 2007, il a écrit à la filiale new-yorkaise de Innocence Project en leur demandant d’enquêter sur son cas. On a alors découvert que du poil pubien avait été conservé depuis tout ce temps et un test d’ADN a été demandé en juillet 2008. Les résultats ont prouvé que ni Dupree ni son compagnon n’étaient coupables. Dupree a été libéré sur parole en 2010, mais pas son compagnon qui avait été accusé d’un autre viol en 1980 et qui est resté en prison, tout en proclamant son innocence pour ce deuxième crime et en attendant les résultats des tests d'ADN. Dupree a reçu une compensation de près de deux millions et demi de dollars.
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Stephen Downing — 27 ans d'emprisonnement
Le cas de Stephen Downing est la plus longue erreur judiciaire de la Grande-Bretagne. Le 12 septembre 1973, une jeune femme a été agressée dans le cimetière de Bakewell en Grande-Bretagne. Battue avec le manche d'une pioche et violée, elle est morte à l'hôpital deux jours plus tard sans avoir pu révéler l'identité de son agresseur.
Le jardinier du cimetière, le jeune Stephen Downing, a immédiatement été montré du doigt. Il a été arrêté et son interrogation s’est prolongée durant près de 10 heures, au terme desquelles il a signé une confession, sans jamais avoir été informé qu’il était en état d’arrestation et qu’il avait droit à un avocat.
Il faudra attendre une campagne acharnée d'un journal local pour prouver son innocence et obtenir sa libération, 27 ans plus tard, en 2001. Downing a d’abord trouvé du travail en tant que chef stagiaire dans un restaurant de Bakewell, utilisant ainsi la formation qu’il avait reçue en prison. Il a par la suite reçu une compensation de 750 000 livres (1 330 000 $).
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William Dillon — 27 ans d'emprisonnement
En 1981, William Dillon avait 21 ans et s’alignait pour une belle carrière en tant que joueur de baseball quand on l’a arrêté et accusé d’avoir battu à mort un homme sur une plage de la Floride.
Dillon avait un très bon alibi, mais des témoins ont déclaré l’avoir vu sur le lieu où le corps avait été trouvé. Ce qui n’a pas aidé sa cause, c’est que l’un de ses compagnons de cellule a déclaré que Dillon avait confessé son crime alors qu’il attendait son procès. L’homme avait menti pour raccourcir sa propre peine.
Ce n’est qu’en 2008, soit 27 ans plus tard, que des tests d’ADN et l’aide de Innocence Project ont réussi à prouver son innocence.
Crédit photo: tpr.org
Michael Morton — 25 ans d'emprisonnement
Michael Morton, né en 1954, est un Texan qui a été accusé et condamné à la prison à vie en 1987 pour le meurtre de sa femme Christine. Ce n’est que 25 ans plus tard que des tests d’ADN ont prouvé qu’il disait vrai quand il clamait son innocence.
Morton a été libéré en 2011 tandis qu’un procureur a été accusé et condamné pour avoir sciemment dissimulé des éléments pouvant servir à sa défense pendant son procès. Ce cas, maintenant fameux, a donné naissance à une réforme des procédures criminelles américaines. Morton a écrit sa biographie intitulée " La prison à vie : le voyage de 25 ans d’un innocent de la prison vers la paix "
Crédit photo: Tom Baffer/New York Daily News
Isidore Zimmerman — 24 ans d'emprisonnement
Isidore Zimmerman a passé 9 mois dans le couloir de la mort et 24 ans dans les prisons de New York pour un meurtre qu’il n’a pas commis. Tout a commencé en 1937 quand un policier a été abattu lors d’un vol à main armée. Six hommes ont été arrêtés et l’un d’eux a accusé Zimmerman, le portier, de leur avoir fourni les armes. Zimmerman a eu beau clamer son innocence il a été condamné avec les six autres hommes pour meurtre au premier degré. Cinq des hommes sont morts sur la chaise électrique et un sixième en prison. Zimmerman était lui aussi condamné à mort, mais deux heures avant son exécution, sa peine a été commuée en prison à vie. En 1962, grâce à un avocat qui l’aidait gratuitement, un appel a renversé l’inculpation et Zimmerman a été libéré et a passé les 20 années suivantes à obtenir une compensation. Il demandait 10 millions de dollars, il a reçu un million en mai 1983. Trois mois plus tard, il mourrait d’une crise cardiaque.
Crédit photo: capture/Flickr
Darryl Burton - 24 ans d'emprisonnement
En 1984, un petit gangster de St Louis, dans l’état du Missouri, a été tué par une balle dans une station-service. Des témoins ont déclaré avoir vu Darryl Burton, un jeune homme qui était en libération conditionnelle après avoir purgé la moitié de sa sentence de deux ans pour vol. Il n’y avait aucune preuve concrète contre lui, mais Darryl a tout de même été accusé et condamné à la prison à vie pour ce crime. Il a toujours clamé son innocence, mais n’a été libéré qu’en 2008, après qu’un juge a déclaré que les preuves suggérant son innocence avaient été cachées au jury pendant son procès. Le vrai coupable a été assassiné en 1986.
Crédit photo: Carla Varisco-Williams
James Richardson — 21 ans d'emprisonnement
James Richardson, né en 1935, a été accusé en 1967 d’avoir empoisonné ses sept enfants, à Arcadia, en Californie. Parce qu’un policier a voulu faire une arrestation rapide sans réellement examiner les preuves qui menaient ailleurs que vers lui, Richardson a passé 21 ans de sa vie en prison. C’était un cueilleur de fruits, il était noir et le jury, blanc, l’a accusé d’avoir tué ses enfants pour pouvoir récolter l’argent des assurances, environ 14 000 $. Pendant des années, la justice a refusé de prendre en considération les aveux répétés de la femme qui gardait les enfants de Richardson au moment de leurs morts et qui déjà à l’époque était accusée d’avoir empoisonné l’un de ses maris.
Richardson a été libéré en 1988, cinq ans avant la fin de son temps d’emprisonnement, quand un juge a finalement déclaré que les preuves contre lui étaient trop minces. Une fois libéré, Richardson a reçu une compensation de 150 000 $, qui est allée aux avocats. Lui et sa femme, qui était restée avec lui tout le temps de son incarcération, ont divorcé. Il vit et travaille maintenant dans un ranch appartenant à son cardiologue où il fait de légers travaux. Grâce à une nouvelle loi américaine passée en 2014, il devrait recevoir une nouvelle indemnisation, environ 1,2 million de dollars.