Connaissez-vous l'effet d'ancrage? Ce terme est utilisé en psychologie et vous en faites peut-être l'expérience dans votre vie de tous les jours sans même vous en rendre compte. On vous explique tout.
Qu'est-ce que l'effet d'ancrage?
À l'instar de l'effet de halo dont nous avons déjà parlé, l'effet d'ancrage (appelé aussi biais de point de départ), est ce que l'on appelle un biais cognitif, en d'autres termes, une distorsion de l'information.
Concrètement, on parle d’ancrage à partir du moment où on a de la difficulté à se défaire d'une première impression. Soumis à l'effet d'ancrage, notre cerveau va en effet avoir tendance à se fier à l'information qu'il a reçue en premier et sera influencé sur les décisions qu'il va prendre ensuite.
Découverte
L'effet d'ancrage a été théorisé pour la première fois par les spécialistes de la finance comportementale et de la psychologie cognitive Amos Tversky et Daniel Kahneman. Leurs travaux ainsi que leurs ouvrages sur ce sujet sont devenus des références dans le domaine et aujourd'hui ils comptent de nombreux disciples qui travaillent dans différentes branches de la psychologie cognitive notamment.
Quelques exemples d'effet d'ancrage
Imaginons que ce soit la rentrée scolaire. Alors que tous les élèves sont déjà installés en classe, un retardataire arrive en cours. Il y a fort à parier que cet élève, que le professeur et les autres élèves voient peut-être pour la première fois, le «cataloguent» comme un élève pas très ponctuel quand bien même il serait en réalité d'une ponctualité exemplaire et que ce retard serait le premier de toute sa scolarité. Mais «le mal est fait», l'effet d'ancrage risque de lui coller une étiquette de retardataire et influencer le jugement des autres. C'est une façon d'illustrer l'importance de faire une première impression.
Les points d'ancrage déforment notre jugement et c'est très vrai avec les chiffres. Imaginons que vous soyez en train de magasiner des vêtements et que vous tombiez sur une paire de pantalons sur laquelle on trouve deux étiquettes de prix, le prix le plus cher étant barré. En regardant l'étiquette du prix le plus élevé, votre cerveau va automatiquement en faire un point d'ancrage, un prix de référence à partir duquel il va juger le prix le moins cher, celui auquel vous pouvez désormais acheter le pantalon. Plus il y aura une différence entre ces deux prix, plus vous aurez l'impression de faire une bonne affaire.
Les psychologues Chris Janiszewski et Dan Uy de l'Université de Floride ont clairement montré à travers leurs expériences combien l'esprit était influencé par un ancrage chiffré. Une de leurs expériences les plus révélatrices de ce phénomène est celle de l'évaluation du prix d'une maison en bord de mer.
On a fait voir à un groupe la photo d'une maison en bord de mer avec un prix rond (800 000$) et on a ensuite demandé à ce groupe d'évaluer le prix de cette même maison. Le résultat était de 751 867$. Un autre groupe devait évalué cette même maison, mais cette fois-ci, il y avait comme prix sur la photo 799 800$. Quand on a demandé à ce second groupe d'évaluer la maison, ils l'ont estimée à 784 671$, soit un prix beaucoup plus proche de celui de la photo.
Cette expérience montre notamment que le fait que le prix, et donc l'ancrage, soit très précis (et non pas un chiffre rond) influence énormément l'estimation des participants. Plus le prix est précis, plus on se dit inconsciemment qu'il n'a pas été donné de manière trop large, au hasard comme ça semble être le cas avec l'évaluation à 800 000$. Notre cerveau est donc encore plus ancré quand la précision est grande.
Difficulté d'éviter les ancrages
De nombreux travaux dont ceux des chercheurs Fritz Strack et Thomas Mussweiler ont montré qu'il était très difficile de déjouer les ancrages, quand bien même on en avait conscience. On a beau savoir qu'on est influencé par une première réponse, notre cerveau a du mal à se détacher de l'ancrage et se fera très probablement influencé par lui malgré tout.
Savoir en profiter
Une fois que l'on a compris la force de l'ancrage et qu'en donnant un chiffre très précis comme ancrage, on influence encore plus le cerveau, on peut utiliser ce biais cognitif à notre avantage. Le meilleur exemple est sans doute celui de la négociation, d'une augmentation salariale par exemple ou concernant l'achat d'un bien. Le premier qui parlera, qui donnera un chiffre aura un avantage certain, car c'est lui qui va déterminer l'ancrage, le prix à partir duquel l'autre va devoir réagir. Si on donne un prix très précis, comme dans l'exemple de la maison en bord de mer, on augmente les chances que son interlocuteur s'approche de ce chiffre. Après, l'art de la négociation ne se limite pas à l'effet d'ancrage évidemment. Mais il peut servir...
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Sources:
Travaux d'Amos Tversky et Daniel Kahneman