On parle beaucoup de l’impact du confinement dû à la COVID-19 sur les enfants. Mais qu’en est-il des adolescents? Pas toujours facile de comprendre les règles, endurer sa famille, composer avec l’incertitude et trouver un nouvel équilibre.
Non, le confinement n’est pas qu’un congé ordinaire comme une tempête de neige. Les écoles sont fermées, oui. Mais les ados – comme les adultes – doivent se plier à diverses interdictions, dont celles de voir leurs amis. Et en pleine période de rébellion, ce n’est pas facile. Ajoutez à cela la cohabitation 24 h/24 alors que d’habitude chacun des membres de la famille vaquent à leurs occupations et ne se retrouvent que pour quelques heures à la fin de leur journée.
Désormais, tout a changé. Vivre ensemble est nécessaire, mais pas toujours rose. «À l’adolescence, les jeunes sont en train de revendiquer une certaine autonomie et de se distancer de leurs parents. Il peut être difficile de les rallier», explique Dre Christine Grou, présidente de l’Ordre des psychologues du Québec. Les adultes et les enfants composent avec une perte de repères. Si pendant la première semaine, plusieurs ont été tentés de prendre le tout comme deux semaines de vacances supplémentaires, le scénario n’est plus le même maintenant. Les écoles sont fermées jusqu’au 1er mai. Beaucoup de parents travaillent de la maison, d’autres vont au boulot et d’autres sont en arrêt pour un certain temps. Aucun adolescent n’aura la même réaction devant le confinement, tout comme les adultes. Certains seront très anxieux, d’autres minimisent les dangers, d’autres tentent d’avoir du contrôle. «Il faut faire appel au côté rationnel des adolescents en le ralliant à la réalité de tout le monde : plus il y a de distance, mieux c’est et plus on voit du monde, plus le risque est grand. Mais il faut aussi admettre avec lui que la situation est frustrante», ajoute la psychologue.
Chacun a à vivre des deuils, à leur mesure, les ados aussi. «On ne doit pas minimiser ce qu’ils vivent. Ils ont le droit d’être frustrés, mais il est important de ne pas rester dans cet état où les idées noires tournent en boucle. Le but est d’arriver à s’en dégager. Donc, on reconnaît d’abord comment on se sent, pour ensuite s’en dégager et se mettre en mode de recherche de solutions alternatives», indique Dr Grou.
«Chaque être humain a une capacité d’adaptation qu’il ne soupçonne pas. Il y a des ondes de choc, puis ça s’apaise. Ce sont des vagues. La période d’adaptation génère du stress, mais il faut trouver comment changer nos comportements pour être en harmonie avec les demandes. Aussi, il ne faut pas oublier que cette situation va avoir une fin. C’est important de ne pas perdre ça de vue», note la psychologue.
Mises en situation et pistes de solutions
1. Accepter les contradictions
Comme tout le monde, les ados ne peuvent pas se rassembler pour voir leurs amis. Pourtant, certains travaillent dans des commerces encore ouverts et peuvent donc «voir» des gens. Cette contradiction peut soulever de l’incompréhension chez certains. «Je ne peux pas voir ma blonde, mais je dois aller travailler et côtoyer des inconnus.»
Piste de solution : Reconnaissez que c’est frustrant, mais sollicitez le côté rationnel de la consigne : «Moins on voit de gens, moins le risque est grand!». Offrez plus de latitude pour les autres moyens de communication.
2. Accueillir le chamboulement
Leurs préoccupations ne sont pas les mêmes que les vôtres, mais cela ne veut pas dire qu’elles sont moins importantes pour autant. Leur bal de 5e secondaire, le spectacle de comédie musicale, une compétition sportive d’envergure, un projet mis en suspens, leur examen de conduite, la remise des diplômes, un voyage scolaire : tout est perturbé. Ils ont à faire le deuil de certaines choses qui leur tenaient à cœur.
Piste de solution : Ne banalisez pas leurs émotions (tristesse, colère, etc.). On pourrait avoir tendance à leur dire «C’est seulement un spectacle, il y a des gens qui vont en mourir», mais chacun a droit à vivre ses deuils. Accueillez ses émotions. Réaliser ses «pertes» ne survient pas toujours en même temps pour tous. Soyez patients et ouverts. Permettez-leur de s’exprimer.
3. Leur donner du «lousse»
Les ados – tout comme les enfants et les adultes – ont besoin de passer du temps seuls. Chaque jeune est différent, mais certains en ont plus besoin que d’autres. Également, il est nécessaire d’admettre qu’on va parfois être irritable, le temps que les choses se placent. «Comme parents, il est aussi normal de prendre une pause des enfants, peu importe leur âge. Chaque adulte a besoin de moment de détente rien que pour soi», souligne Dr Grou.
Piste de solution : Distribuez des tâches sans exagérer. Aussi, ne les forcez pas à toujours faire une activité familiale si l’envie n’est pas là. Vous pouvez tout de même garder certaines routines comme le repas du soir ensemble. Faites un conseil de famille pour trouver ce qui pourrait être fait. Ne croyez pas que tout se placera tout seul; il faut en discuter.
4. Responsabiliser le temps d’écran
Difficile de fixer un cadre strict d’usage des téléphones et des tablettes avec un ado qui est presque adulte.
Piste de solution : Une des bonnes façons serait de les responsabiliser face à leur propre utilisation, c’est-à-dire leur faire comprendre que leurs journées doivent être remplies de diverses activités. «Il est important pour tous de rester actif physiquement, de se stimuler intellectuellement, d’être en communication avec les autres, de se détendre et de s’amuser», précise Dr Grou. C’est encore trop? Mettez des règles.
5. Partager les espaces sans se piler sur les pieds
Votre maison ne vous semblera jamais aussi petite qu’en ce moment! Il est important de préserver son espace personnel et d’établir certaines règles pour partager ceux qui sont communs.
Piste de solution : Le mieux? En parler. «J’ai envie d’écouter un film dans le salon : quel serait le meilleur temps?». Si chacun nomme ses besoins, tout le monde peut faire un effort pour trouver des solutions. Il est important de ne pas rester seul avec ses frustrations, car la situation risque vite de devenir explosive.
6. Ouvrir la discussion et adaptez-vous
Parler en famille pour ne pas cohabiter en plus avec les malentendus et les idées noires.
Piste de solution : Ouvrez la porte à la discussion et accueillez ce que votre ado a à vous dire sans le couper et sans juger ce qu’il dit. Il ne veut pas se confier? Soulignez que vous ne pouvez pas deviner ce qu’ils ressentent et qu’ils doivent s’ouvrir un peu pour qu’on puisse les comprendre, les rassurer et trouver une façon de répondre à leurs besoins. Il se sent triste? Demandez-lui ce qui lui ferait du bien. De la musique? Bien sûr, il peut prendre ses écouteurs, mais vous pouvez aussi lui offrir de sortir faire une marche pendant qu’il se défoule sur sa guitare électrique.
7. Faire des travaux d’école ou non?
Se garder stimulé intellectuellement est primordial pour mieux traverser une période d’adaptation. C’est excellent pour une bonne hygiène de vie.
Piste de solution : Bien sûr, il y a les travaux scolaires envoyés par l’école, mais il y a plus. «On n’en fait pas 8 heures par jour!, lance d’abord Christine Grou. Et la stimulation ne passe pas que par les travaux scolaires. Comme le cerveau est une éponge, on en profite par encourager des apprentissages en tout genre : changer un pneu, couture, cuisiner, faire des tâches, apprendre une nouvelle langue, etc.» Et le mot d’ordre : ne pas mettre de pression, mais y aller plus par intérêt.
8. Les encourager à bouger
Bouger fait du bien à tous, en tout temps! «Les adolescents ont besoin de dépenser leur énergie. C’est le moment d’aller courir ou faire un entrainement», insiste Dr Grou. D’autant plus que l’activité physique permet aussi de mieux dormir.
Piste de solution : Transformez un coin du salon en salle d’entraînement pendant certaines heures.
9. S’amuser!
C’est aussi le moment de s’amuser ensemble. Les moments de détente et de divertissement sont aussi à intégrer dans l’horaire familial.
Piste de solution : Trouvez des activités qui vous rassemblent et que vous n’avez jamais le temps de faire habituellement. Pensez à ce que vous faites en vacances. Une longue partie d’un jeu de société? Un casse-tête avec un sac de chips. Un marathon de films que vous aimez. Cuisinez ensemble.
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