Le co-dodo, ou sommeil partagé, c'est lorsqu'un parent dort près de son bébé, en général dans la même pièce. Le partage du lit est une forme spécifique de co-dodo : le bébé dort avec au moins un de ses parents sur la même surface. Pratique aussi vieille que l'humanité, le co-dodo est encore très répandu chez les deux tiers de la population de la planète, dans les pays industrialisés ou non, d'Asie, d'Afrique, d'Amérique du Sud et Centrale. Chez nous, après de nombreuses années de sommeil en solitaire, le co-dodo connait une recrudescence. Comment s'assurer cependant qu'il soit sécuritaire?
Mort subite du nourrisson
La mort subite du nourrisson (MSN) est la cause la plus fréquente de décès des bébés d'un mois à un an. Elle a été réduite de moitié durant les années 90 à la suite des campagnes de sensibilisation recommandant aux parents de coucher leur bébé sur le dos, sur une surface plate et ferme, sans couvertures ou oreillers mous, et aux mères de s'abstenir de fumer durant leur grossesse. Lorsqu'on respecte toutes ces précautions, on constate que la probabilité de MSN diminue encore de 50 % chez les bébés qui dorment à proximité de leurs parents par rapport à ceux qui dorment en solitaire dans leur chambre. La Société canadienne de pédiatrie recommande donc depuis 2004 le co-dodo parents-bébé durant les premiers six mois de vie du bébé. On y recommande le co-dodo sur des surfaces séparées, mais pas le partage du lit, qui comporte certains risques qu'il faut connaitre.
Canapé ou fauteuil
On évitera toujours de dormir avec un bébé sur un canapé, un fauteuil rembourré ou un lit d'eau, car on multiplie alors par 25 le risque de MSN ou de mort accidentelle par asphyxie. Non seulement la surface est trop molle, mais dans les canapés et fauteuils rembourrés il y beaucoup d'endroits où le bébé peut se coincer et s'asphyxier.
Même chambre, deux lits
Moïse ou couchette
Le co-dodo sur des surfaces séparées satisfait plusieurs parents, car il leur permet de vérifier si bébé respire bien et de répondre à ses besoins nocturnes sans trop se réveiller eux-mêmes. Pour le bébé, il est extrêmement sécurisant d'entendre la respiration de ses parents, de sentir leur odeur, de les savoir très proches s'il a besoin d'eux. En général, ce co-dodo se pratique avec un moïse ou une couchette près du lit des parents. Il existe aussi de petits lits spéciaux qui s'accrochent sur le rebord du lit parental ou d'autres qu'on dépose dans le lit, entre le père et la mère.
Le lit parental
Si les moïses et couchettes pour bébés sont généralement construits en respectant les normes de sécurité pour ces derniers, les lits d'adultes, eux, ne le sont pas. Alors, en partage du lit, il s'agit de reproduire dans son lit d'adulte toutes les conditions de sécurité pour bébé. Il faut d'abord s'assurer que le bébé ne puisse pas tomber du lit. La solution la plus simple est de se débarrasser de la structure du lit et de poser le matelas par terre, à une bonne distance du mur. Le risque de chute grave est ainsi évité. La plupart des accidents mortels dans le lit parental surviennent lorsque le bébé se coince entre le cadre du lit et le matelas, entre la tête du lit, ou son pied, et le matelas; ou encore, entre le matelas et le mur (ou un meuble) si on a poussé le lit contre un mur et qu'il s'en est dégagé un tant soit peu.
Couvertures
Dans le lit parental, le bébé doit aussi être éloigné des couvertures, couettes, oreillers mous, etc. Si les parents utilisent des couvertures, il est préférable d'en avoir plusieurs qui sont minces, en tissu poreux comme du coton, et d'éviter les couvertures épaisses et les duvets. Le bébé peut dormir, toujours sur le dos, dans une gigoteuse ou un pyjama à pattes assez chaud, sans couverture. Avant l'âge d'un an, il faut aussi voir à ce que le bébé ne couche pas à côté d'un enfant plus âgé, ni près d'un animal domestique. Si un enfant plus âgé couche dans le lit familial, soit on dépose le jeune bébé dans sa couchette à proximité du lit familial, soit on s'assure en tout temps que le corps de la mère (ou du père) sert de rempart entre le plus vieux et le plus jeune.
On conseille aussi aux parents obèses de ne pas partager leur lit avec bébé. Le poids de leur corps sur le matelas peut créer un creux dans lequel le bébé pourrait se coincer et il y a donc risque d'écrasement du bébé.
Fumée
Lorsque les parents fument (s.v.p. jamais dans la chambre du bébé!), on recommande le co-dodo sur des surfaces séparées. On ne conseille pas à une mère qui a fumé durant sa grossesse de coucher avec son bébé, même si elle l'allaite. La combinaison du tabagisme maternel durant la grossesse et le partage du lit est un facteur de risque pour la MSN, alors que le co-dodo sur des surfaces séparées en est un de protection.
Alcool
Si l'un ou l'autre des parents est sous l'effet de l'alcool ou de toute autre substance affectant la vigilance, il est très important de déposer l'enfant dans sa couchette et non dans le lit parental. Il en est de même pour les parents excessivement fatigués ou malades. Quand on constate en partage du lit un décès de bébé par écrasement ou asphyxie accidentelle, très souvent le parent concerné n'était pas en état de s'occuper d'un bébé.
Malgré tous ces avertissements qui nous portent à croire que le partage du lit est dangereux pour le jeune bébé, ce n'est pas le cas lorsque les précautions de base sont respectées par les parents. Certains experts font même l'hypothèse que la situation d'une mère non-fumeuse qui allaite et partage son lit avec son bébé constitue au contraire un facteur de protection contre la MSN. La littérature scientifique ne contient aucun cas d'une telle mère qui aurait écrasé son bébé durant le partage du lit à moins que d'autres facteurs ne soient présents : alcool, drogues (incluant certains médicaments contre le rhume ou les allergies qui entrainent la somnolence), fatigue excessive. La Ligue La Leche encourage les mères à allaiter couchées dans leur lit, même s'il leur arrive de s'endormir avec leur bébé contre elles. On sait que cette proximité nocturne mère-bébé favorise l'établissement et la durée de l'allaitement. Il semble maintenant démontré aussi que l'allaitement soit un facteur de protection contre la MSN.
Un choix
Le co-dodo se doit d'être un choix familial. Il n'est un bon choix que lorsque toute la famille dort mieux et que chacun y voit ses besoins affectifs et physiques respectés. Certains parents ont des raisons valables de choisir que leur bébé dorme dans sa propre chambre. À ce moment, la réponse rapide aux pleurs nocturnes et de nombreux câlins le jour aideront à bien répondre aux besoins de contact du bébé.
Claudette Nantel, psychothérapeute, spécialiste en psychologie pré et périnatale
Cet article est une gracieuseté de Mères et Cie.