À une époque pas si lointaine, les punitions corporelles étaient considérées comme un des outils qu'un parent pouvait utiliser régulièrement pour encadrer ses enfants. On pouvait entendre des commentaires du genre : « une bonne petite tape sur les fesses, ça saisit et ça replace les idées »!
Si on remonte un peu plus loin dans le temps, les punitions physiques étaient même utilisées à l'école... En effet, nos parents et grands parents se remémorent facilement les coups de règles sur les doigts et la fameuse « strap » du directeur.
Aujourd'hui, non seulement de nombreux parents ne peuvent s'imaginer toucher à un seul cheveu de leur enfant pour les encadrer, mais plusieurs d'entre eux se sentent même coupables de leur imposer des limites ou d'utiliser d'autres types de conséquences, de peur de les traumatiser!
Que penser de tout ça?
Ça fait longtemps que les experts le savent et répètent que les punitions corporelles sont non seulement inefficaces à long terme, mais ont également des conséquences négatives pour le développement psychologique de l'enfant.
Désensibilisation
À court terme, une tape sur les fesses pourra surprendre le bambin qui sera probablement plus obéissant sur le coup. À long terme, si elle est utilisée régulièrement, la tape ne le surprendra plus et il est possible qu'il s'y désensibilise.
Imitation
Il pourrait également apprendre que donner des tapes est une façon de régler des problèmes, puisque c'est une solution utilisée par ses parents... ses principaux modèles!
Difficultés d'adaptation
Enfin, un enfant qui reçoit régulièrement des fessées peut développer de l'anxiété et voir son estime de soi diminuer. C'est grave, puisque l'estime de soi constitue une sorte de bouclier qui protège l'enfant des difficultés d'adaptation, des adversités de la vie et des problèmes de santé mentale.
Ce qu'en dit le Code criminel
Encore aujourd'hui, au Canada, l'article 43 du Code criminel peut se lire ainsi :
« Tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances. »
Pourquoi cet article existe-t-il encore, alors qu'une majorité d'experts s'entendent pour dire que les punitions physiques comportent beaucoup plus d'inconvénients que d'avantages?
En fait, la Cour suprême du Canada s'est penchée sur la question en 2004, et la majorité des juges (6 sur 9) ont maintenu la validité de cet article. Une des raisons est que si l'on abrogeait cet article, un parent qui serre un bras ou qui donne une petite tape pourrait être accusé de voie de fait, ou un autre parent qui utilise le retrait dans la chambre pourrait être accusé de séquestration!
Ainsi, même si cet article de loi envoie un message un peu malsain à quelques parents qui pourraient être mal intentionnés, on le conserve, parce que le supprimer pourrait donner lieu à des aberrations au plan juridique.
Et les parents?
Tout parent, dans un moment d'émotion intense, peut, de façon exceptionnelle, donner une tape sur les fesses de son enfant qui a fait une grosse bêtise, sans nécessairement être un « abuseur » d'enfant!
Pensez-y... votre petite fille de trois ans se dirige vers la rue en courant sans regarder des deux côtés et vous voyez une voiture qui arrive assez rapidement. Il est fort possible que vous ayez le réflexe de courir, de l'arrêter en lui tenant fermement le bras et même de lui donner une petite tape sur la fesse gauche pour être bien certaine qu'elle ne recommencera plus jamais.
Un sentiment de culpabilité vous envahirait sûrement après une telle expérience, mais je suis certaine que vous trouveriez exagéré que l'on vous fasse un procès et que l'on vous déclare criminelle à cause de cette intervention! C'est pour ça qu'on ne criminalise pas la fessée, mais que parallèlement à tout ça, nous avons des lois et un système de protection de la jeunesse qui veille du mieux qu'il peut à protéger les enfants de la négligence ou des abus de toute sorte.
D'autres moyens
Cela dit, il existe tellement d'autres moyens que la fessée pour encadrer et élever un enfant, qu'il est difficile de comprendre pourquoi un parent bien informé pourrait encore aujourd'hui y avoir recours sur une base régulière :
- Encourager le dialogue (quand il est calme et à l'écoute)
- Exercer le renforcement positif et la valorisation (quand il se comporte bien)
- Ignorer les crises de colère (pour qu'il comprenne rapidement qu'elles ne lui rapportent rien)
- Pratiquer le retrait dans un coin, sur une chaise ou dans la chambre (autre façon d'ignorer la crise et de l'aider à revenir plus rapidement au calme).
- Retirer un privilège pour une petite période de temps (jouet préféré, vélo, ordinateur, télé, jeux vidéo...)
- Exiger un acte de réparation envers la personne qu'il a blessée, bousculée ou insultée (cela comporte l'avantage de l'orienter vers un comportement positif qui lui vaudra des félicitations par la suite).
Alors, chers parents, évitez d'avoir recours à toute forme de punition corporelle... selon moi, ces formes d'interventions ne comportent que des inconvénients et détérioreront votre relation avec votre enfant. Informez-vous plutôt sur les autres moyens de l'encadrer.
Et si, dans un moment de stress, vous vous surprenez à tirer une oreille, à serrer un bras ou à donner une petite tape sur une fesse au travers l'habit de neige... respirez et revenez au calme : on ne vous mettra pas en prison. Mais, ne recommencez plus!
La meilleure façon d'éviter ces situations, c'est d'intervenir avant que vos enfants n'atteignent les limites de votre colère... s'ils les atteignent malgré tout, retirez-vous et revenez au calme avant d'intervenir.