L'angoisse ou le manque d'expérience peuvent amener certains parents à surprotéger leurs enfants. Cependant, au nom de la « sécurité », il semble que ces parents exposent davantage leurs enfants à plusieurs problèmes.
Selon certains auteurs, les mères seraient plus sujettes à agir de la sorte, les pères étant réputés contrebalancer ce comportement.
Évidemment, elles ne désirent que le bien de leurs petits, mais il y a une grande distinction à faire entre protection et surprotection. Ainsi, il est sain de se poser la question suivante : quelle sorte de parents sommes-nous? Faisons le tour de cette question épineuse.
Protection ou surprotection?
« La protection d'un enfant devient abusive quand elle entrave son développement », définit Stéphane Clerget, pédopsychiatre. Chaque parent doit apprendre à protéger son enfant contre les dangers de son environnement, mais il est important de le faire sans le surprotéger.
L'expérimentation est importante
L'intelligence du bébé et du jeune enfant n'est pas encore assez développée pour leur permettre de comprendre la notion de « danger ». Les parents doivent donc user de vigilance afin de minimiser les risques d'incidents malheureux. Cependant, cela n'implique aucunement de les freiner dans leur besoin d'expérimenter, celui-ci étant nécessaire au processus d'apprentissage de l'enfant. Il en sera de même à chaque étape de son évolution.
Suprotection et dépendance
Selon Germain Duclos, psychoéducateur, orthopédagogue et conférencier de renom, « protéger un enfant, c'est adopter des attitudes éducatives et aménager des conditions de vie susceptibles de répondre à ses besoins de développement. En se soustrayant à cette responsabilité, le parent fait preuve de négligence.
Le fait de surprotéger l'enfant ou de faire les choses à sa place ne favorise pas non plus son développement; cela le maintient plutôt dans un état de dépendance. Cette attitude surprotectrice nuit à l'estime de soi de l'enfant, qui y voit la confirmation de son incapacité à faire les choses lui-même. »
Surprotection et faible estime de soi
Il est donc important de se questionner sur nos attitudes parentales afin de ne pas adopter une attitude surprotectrice avec nos enfants. En effet, plusieurs recherches viennent confirmer ce lien étroit entre « surprotection » de la part des parents et « faible estime de soi » chez l'enfant. Cependant, les enfants négligés et mal protégés souffriront, eux aussi, d'une faible estime d'eux-mêmes. Tout est une question d'équilibre!
Exemples d'attitudes protectrices
- Vérifier qu'il n'y ait pas d'objets dangereux dans le berceau de bébé;
- Vérifier si sa couche est propre;
- Éviter de changer fréquemment de gardienne;
- Ne jamais perdre de vue notre jeune enfant à l'extérieur de la maison;
- Fermer à clé les armoires contenant des produits dangereux;
- Aller chez le médecin lorsqu'il se plaint d'avoir mal;
- Tenir la main de notre enfant pour traverser la rue;
- Exiger qu'il nous avertisse s'il va jouer chez un ami;
- Etc.
Exemples d'attitudes surprotectrices
- Accourir dès les premiers pleurs de notre enfant;
- Ne jamais permettre aux étrangers de le prendre;
- Éviter de sortir en couple pour ne pas avoir à le faire garder;
- Interdire à notre enfant de grimper ou d'explorer la maison;
- Fermer à clé toutes les armoires;
- Répondre aux besoins de notre enfant avant qu'il ne les exprime;
- Donner ce qu'il veut à notre enfant pour éviter une crise;
- Refuser constamment qu'il aille chez des amis;
- Etc.
L'anxiété, grand ennemi du parent moderne
Parents angoissés
Selon Ercilia Palacio-Quintin, psychologue, « l'anxiété est le grand ennemi du parent moderne ». Les parents angoissés seront donc plus enclins à exercer une surprotection sur leurs enfants, l'environnement immédiat de ces derniers étant une source inépuisable de « dangers » potentiels.
Grossesse tardive
Par ailleurs, les grossesses de plus en plus tardives et les problèmes d'infertilité sont deux facteurs déterminants qui contribuent à réduire le nombre d'enfants par famille. Ceci expliquerait peut-être, en partie, les comportements surprotecteurs de certains parents. En effet, lorsque l'enfant tant désiré arrive enfin, souvent après plusieurs années d'attente, il devient d'autant plus un « être cher », un « bien » précieux qu'il faut choyer et préserver à tout prix.
Impact de la surprotection sur les enfants
Perte d'autonomie
Un enfant que l'on surprotège se sent vite étouffé. En transmettant nos peurs à nos tout-petits et en les limitant dans des actions considérées normales dans leur développement, nous ne les encourageons pas à aller de l'avant. L'enfant peut donc réagir de deux manières.
Certains se feront complices de cette surprotection et se sentiront en confiance uniquement à l'intérieur de leur relation parentale. En dehors de celle-ci, ils risqueront de se montrer craintifs et auront du mal à aller vers les autres, attitudes qu'ils pourraient être contraints à garder toute leur vie.
Vers quelqu'un de fort
Sur un plan affectif et amical, ils s'attacheront facilement à quelqu'un de plus fort, capable de reproduire la carcasse protectrice. À l'inverse et plus rarement, l'enfant surprotégé pourra s'avérer particulièrement casse-cou et amateur de grands risques. Dans les deux cas cependant, il sera difficile, pour ces enfants, de savoir où se situent les véritables dangers, car ils n'auront pas appris à les hiérarchiser...
Perte de confiance en eux et d'estime de soi
Selon Danielle Laporte, psychologue clinicienne et auteure de nombreux ouvrages sur la psychologie de l'enfant, « l'estime de soi, c'est la certitude intérieure de sa propre valeur, la conscience d'être un individu unique, d'être quelqu'un qui a des forces et des limites. L'estime de soi est liée à la perception qu'on a de soi-même dans les différents domaines de la vie. Les enfants forgent leur image d'eux-mêmes en observant et en écoutant leurs parents ».
Ainsi, « attention, tu vas tomber! » ou « laisse-moi faire, tu ne vas pas y arriver » sont des paroles illustrant des comportements à éviter si l'on veut encourager nos marmots à avoir confiance en eux.
Plus ils percevront votre confiance, plus ils se sentiront capables d'agir, avec vous au départ, puis sans vous. Il est cependant important de savoir que les frustrations, tout autant que les gratifications, sont importantes pour le développement de l'estime de soi chez l'enfant.
Pour un enfant, avoir une bonne estime de soi, c'est essentiellement :
- Être bien dans son corps;
- Avoir le sentiment profond d'être aimable;
- Avoir la conviction d'être capable;
- Être fier d'être un garçon ou fière d'être une fille;
- Être à l'aise avec les autres;
- Espérer et croire que ses besoins seront comblés et que ses désirs seront, sinon satisfaits, du moins reconnus dans un avenir rapproché.
Solutions
Aucun parent n'est parfait. Il est cependant important de garder à l'esprit six mots clés afin d'éviter la surprotection et ainsi favoriser l'estime de soi de nos petits : plaisir, amour, sécurité, autonomie, fierté et espérance. En ayant constamment ces mots en tête pour orienter nos actions et celles de nos marmots, les erreurs se feront de plus en plus rares :
Plaisir
Ce sentiment doit être ressenti par l'enfant grâce aux caresses et aux baisers de ses parents, le plaisir du jeu, celui d'apprendre et de vivre en société.
Amour
Se doit d'être démontré et verbalisé de plusieurs façons par les parents favorise le fait d'être aimé et permet de se sentir aimable, important et bon intérieurement.
Sécurité
La sécurité évite à l'enfant de vivre constamment dans la peur et l'inquiétude, sentiments qui nuisent au développement d'une bonne image de soi.
Autonomie
Les parents favorisant l'autonomie ne cessent pas pour autant de « faire attention » à leur enfant puisqu'ils encouragent cette volonté de faire les choses par soi-même.
Fierté
En soulignant ses bons coups et ses réussites, en le valorisant, en favorisant l'expression de tous ses talents, en ayant des attentes réalistes et en l'acceptant comme il est, les parents apprennent à leur enfant à être fier de lui.
Espérance
Pour grandir sainement, l'enfant doit pouvoir espérer et croire que ses parents vont entendre ses demandes, répondre à ses besoins et écouter ses désirs.
Parents anxieux, enfants anxieux
On favorise la confiance en soi de notre enfant s'il sent qu'on encourage son plaisir, qu'on l'aime et qu'on lui met des limites qui le sécurisent. Il est primordial de lui permettre de faire des expériences personnelles, de le féliciter et de l'aider à persévérer. Il faut donc l'encourager à apprendre tout en incarnant une présence rassurante et protectrice, et ce, sans aller au-devant de ses actions.
Pour ce faire, il est essentiel de ne pas transmettre nos peurs et nos angoisses à nos bambins. Les parents angoissés devront donc se raisonner et, s'il le faut, demander de l'aide afin de réduire le stress associé aux dangers potentiels entourant leur enfant.
Petite histoire...
Une maman, dans un parc, regarde son petit grimper dans l'échelle d'un jeu pour enfant. À une certaine hauteur, le bambin demande à sa maman s'il est trop haut pour continuer à monter : « Est-ce que c'est trop haut, maman? » La mère, de lui répondre : « As-tu peur mon garçon? ». « Non », répond l'enfant. « Alors, ce n'est pas trop haut... »
Catherine Darlington, rédactrice Canal Vie