Quoi faire quand notre enfant ne veut pas manger? La grande question! Et elle revient souvent dans la tête de beaucoup de parents. C'est la raison pour laquelle nous avons demandé à la nutritionniste Geneviève O'Gleman de nous éclairer sur le sujet :
Madame O'Gleman, qu'est-ce qu'on fait quand notre enfant ne veut pas manger?
Il faut d'abord en déterminer les causes. Est-ce que c'est parce qu'il n'a pas faim ou parce qu'il n'aime pas ce qu'on lui propose? Dès l'âge de 2-3 ans, l'enfant est en mesure de répondre à cette question.
Le manque d'appétit
S'il n'a pas faim, il faut le respecter sans le forcer, sinon il va perdre sa capacité à évaluer son appétit. Certains enfants ont des appétits d'ogre et d'autres, des appétits d'oiseau. Les portions que l'enfant mange peuvent même varier de jour en jour. Un appétit d'ogre peut se transformer en appétit d'oiseau le lendemain et c'est tout à fait normal.
Par contre, s'il n'a pas faim, il doit rester à table avec nous, participer au repas, raconter sa journée comme les autres. Son manque d'appétit peut aussi bien être la résultante d'une envie d'aller jouer!
Causes possibles
Si la situation se perpétue soir après soir, il faut creuser un peu plus loin pour trouver les causes de ce manque d'appétit. Ses collations sont peut-être trop grosses ou trop bourratives (on peut alors les remplacer par des fruits), trop rapprochées de l'heure du repas, il boit peut-être trop de jus pendant l'après-midi (on peut commencer par le diluer dans de l'eau pour finalement remplacer le jus complètement par l'eau). Le manque d'appétit est peut-être aussi une conséquence d'un manque d'exercice physique. On pourra alors corriger la situation pour qu'il retrouve l'appétit à l'heure des repas.
Se montrer ferme
Si l'enfant décide de ne pas manger, il faut qu'il comprenne que le repas est pris à telle heure, en famille, et que ce n'est pas en soirée que soudainement, il peut réclamer un repas, même s'il n'a pas mangé au souper. S'il a faim une nuit, ça ne va pas compromettre sa croissance. Après deux, trois soirs, il devrait commencer à comprendre les règles du jeu.
Le goût
S'il refuse de manger, ça peut aussi être parce qu'il n'aime pas ce qu'on lui sert. Il faut savoir qu'en général, ça prend entre 10 et 15 nouvelles expositions à un aliment pour qu'un enfant l'accepte. Or, les parents se découragent en moyenne après 3 refus.
La persévérance est la clé du succès!
Il faut persévérer en lui présentant le même aliment dans son assiette à chaque fois que ça fait partie du repas, sans insister pour qu'il le mange. On l'encourage à y goûter, mais sans pression, ni obligation. C'est à lui de décider quand il sera prêt à le faire.
Certains petits acceptent tout du premier coup alors que d'autres enfants ont besoin de temps pour se familiariser avec l'aliment inconnu. L'enfant apprivoisera d'abord l'aliment par la vue. Puis, par l'odorat, le toucher et il pourra enfin avoir envie d'y goûter.
Il pourra apprécier davantage les aliments boudés s'ils sont présentés sous différentes formes (en soupe, en bouilli...) ou si vous évoquez à voix haute votre plaisir de manger cet aliment : sa texture, sa saveur, son apparence...
On a souvent tendance, comme parent, à démontrer les avantages pour la santé de manger certains aliments à nos enfants, mais la notion de santé est loin d'eux. Il faut plutôt jouer sur l'aspect du plaisir. Et encore une fois, il faut être constant et ferme en lui disant que c'est son choix s'il ne mange pas, mais qu'il n'aura rien d'autre que ce qu'il a dans son assiette.
Refuser de manger pour attirer l'attention
Un des seuls contrôles que l'enfant exerce sur ses parents est celui de décider de manger ou non. S'il sent qu'il touche une corde sensible chez ses parents, il continuera à jouer sur cet aspect de sa vie pour attirer l'attention. En ne liant pas l'émotion à l'alimentation, pas de chantage, ni de menaces, et en restant constant dans ses décisions, le parent a beaucoup plus de chances de voir les problèmes alimentaires de son enfant s'amoindrir.
Des petits trucs pour faciliter l'intégration d'un aliment nouveau ou qu'il n'apprécie pas?
On peut motiver l'enfant par l'imagination, en créant des dessins, des formes dans l'assiette avec les différents aliments.
On peut aussi, dès la maternelle, l'inviter à participer à la préparation des repas. D'une part, il sera plus fier, valorisé par ce qu'il a préparé, donc plus enclin à y goûter, d'autre part, puisqu'il a vu ce qu'il a mis dans la préparation, il pourra être davantage en mesure d'identifier les différents ingrédients et aliments qui lui sont servis dans son assiette.
Et si c'est le plat au complet qu'il n'aime pas, on le laisse ainsi sans manger?
Oui. Ça peut paraître dur, mais la plupart des parents tombent dans le piège et servent un autre plat à leur enfant. Celui-ci comprend donc assez vite qu'il n'a qu'à dire qu'il n'aime pas un plat pour qu'on lui en serve un autre qu'il préfère. Il est rare qu'un enfant ait une réelle aversion pour un plat et si c'est le cas, ça se voit et on ne fera pas exprès pour le refaire souvent.
Je suis toutefois d'avis qu'il ne faut pas faire des repas différents pour chaque personne de la famille. Même si un n'aime pas, par exemple, le pâté chinois, mais que le reste de la famille en raffole, on ne peut pas priver tout le monde juste pour lui. On lui expliquera plutôt qu'une autre fois, ce sera à lui qu'on fera plaisir. On ne doit pas offrir de plan B pour lui dans ce cas.
Quand doit-on s'inquiéter?
Un enfant se laisse rarement mourir de faim. Vous pouvez commencer à vous inquiéter quand votre enfant est plus fatigué, qu'il ne semble pas vouloir faire les activités qu'il faisait avant, qu'il éprouve une plus grande lassitude. À ce moment-là, il serait bon de consulter un médecin ou une nutritionniste qui évaluera sa courbe de croissance et donnera des conseils personnalisés pour améliorer ses apports nutritifs.
Et pour les ados?
Contrairement à un enfant, l'ado est plus sensible concernant sa santé. À tout le moins, il est davantage conscientisé à l'importance de bien manger. Vous pouvez lui expliquer les bénéfices qu'il a à manger sainement, mais sans le traiter en enfant ni décider pour lui. S'il est sportif, c'est encore plus facile de lui faire réaliser que de mettre du bon carburant dans son corps lui donnera de meilleurs rendements. Vous pouvez aussi lui faire réaliser qu'il pourrait très bien faire autre chose de son argent de poche, plutôt que de le dépenser dans l'achat de poutine et de hot dog. Il ne faut pas bannir complètement la malbouffe. L'interdit est trop attrayant!
Merci pour cette entrevue!
Violaine Dompierre, éditrice Canal Vie