Il existe des avantages certains au bilinguisme, ne serait-ce que de pouvoir se faire comprendre par un plus grand nombre de personnes lorsqu’on voyage ou d’avoir accès à plus de contenu dans leur langue originale, entre autres.
Mais saviez-vous que le bilinguisme amène également des différences au niveau du fonctionnement du cerveau? Voyons voir.
La notion de bilinguisme
À l’échelle mondiale, 43 % des gens sont bilingue, comparé à 40 % de la population qui ne maîtrise qu’une seule langue. Les personnes qui fonctionnent en plus qu’une langue représentent donc la majorité!
On définit la maîtrise d’une langue, qu’elle soit maternelle ou étrangère, à travers deux aspects «actifs» -parler et écrire- ainsi que deux aspects «passifs» –lire et écouter. Et même si certaines personnes bilingues ont ces quatre aspects en équilibre, c’est-à-dire pratiquement au même niveau, il existe également des personnes dont les différents aspects sont variables.
Une personne bilingue possède la capacité cognitive «de désactiver» temporairement une langue dans leur cerveau et «d’activer» la deuxième. Ni l’une ni l’autre de ces activités ne sont faciles et ne sont données à tout le monde, mais des études récentes ont démontré que le cerveau trouve plus simple l’étape d’activation que celle de la désactivation.
Les trois types de bilinguisme
Il n’y a pas qu’une seule manière de devenir bilingue, mais bien plutôt 3 types de bilinguisme différents. Chacune de ses manières peut mener à une maîtrise complète des 4 aspects de la langue seconde, c’est-à-dire à un bilinguisme complet.
Le bilinguisme composé
Il s’agit de personnes qui développent deux codes de langues de manière simultanée, en très bas âge. Une situation type de ce genre de bilinguisme survient lorsque leurs proches leur parlent dans deux langues différentes à la maison : français pour papa et anglais pour maman, par exemple.
Ce qu’il est important de retenir, c’est que l’acquisition des deux langues se fait au même moment, alors que l’enfant construit sa compréhension du monde. Dans le cerveau de ces enfants, les deux langues sont complètement égales.
Le bilinguisme coordonné
Avec ce type de bilinguisme, les deux langues demeurent fondamentalement séparées pour la personne qui les parle, parce qu’il y a des contextes clairs et définis entre les langues. Par exemple, parler uniquement espagnol à la maison, mais uniquement français à l’école.
Le bilinguisme subordonné
C’est peut-être le type de bilinguisme le plus fréquent : il survient un peu plus tard dans la vie et arrive soit par choix (vouloir apprendre une langue seconde) ou par nécessité (se retrouver dans un nouveau lieu de vie). Avec ce type de bilinguisme, les personnes apprennent leur deuxième langue en la filtrant à travers leur langue maternelle.
Le cerveau et la «période critique»
Dans le cerveau humain, l’hémisphère gauche est plutôt relié à des processus analytiques et logiques, tandis que l’hémisphère droit est plus en lien avec des processus créatifs, émotionnels et sociaux. Cette distinction est moins évidente durant les premières années de la vie d’une personne; la «latéralisation» survient en effet plus tard dans la vie. En général, la maîtrise d’une langue est donc associée à l’hémisphère gauche, mais surtout chez les adultes.
C’est pourquoi une des théories entourant le bilinguisme affirme qu’il existe une «période critique» autour de l’enfance, durant laquelle il est plus facile d’apprendre de nouvelles langues étant donné la plasticité du cerveau, c’est-à-dire les capacités de celui-ci à former de nouvelles connexions. Lorsque la 2e langue est apprise durant les premières années de vie, cette même théorie voudrait que les enfants puissent utiliser leurs deux hémisphères pour le faire, maîtrisant ainsi beaucoup mieux les aspects contextuels et sociaux de leur langue seconde.
De récentes recherches menées sur des personnes qui sont devenues bilingues à l’âge adulte ont même démontré qu’elles étaient moins émotives et plus rationnelles lorsqu’ils résolvaient des problèmes dans leur langue seconde que dans leur langue maternelle! Fascinant, n’est-ce pas?
Le cerveau des personnes bilingues
Semble-t-il qu’il est possible de distinguer une personne bilingue ou multilingue simplement à partir d’un scan de son cerveau : celui-ci comporte visiblement plus de matière grise, qui contient la plupart de nos synapses et de nos neurones.
Il y aurait également plus d’activité cérébrale que la normale dans certaines régions du cerveau lorsque les personnes pratiquent leur langue seconde.
Les scientifiques croient même que le travail supplémentaire que demande le bilinguisme sur le cerveau pourrait retarder l’apparition de maladies cognitives telles que la démence et l’Alzheimer pendant des années (jusqu’à 5 ans)!
Le bilinguisme : un grand atout
Avant l’apparition de la neurolinguistique, une discipline qui travaille sur les effets du langage sur le cerveau et se base sur l’imagerie médicale, la notion de bilinguisme était loin de faire l’unanimité chez les scientifiques. Dans les années 60, le bilinguisme était même souvent considéré comme un handicap, parce qu’on croyait qu’il freinait le développement normal chez l’enfant! On croyait alors que les enfants bilingues dépensaient «trop de ressources et d’énergie» à faire des distinctions constantes entre leurs deux langues.
Aujourd’hui, on sait qu’il n’en est rien. Même si certaines études ont effectivement démontré de petits délais et quelques erreurs dans des tests inter-langues chez des enfants et adolescents bilingues, elles ont également révélé que le bilinguisme menait souvent au renforcement du cortex frontal. Cette partie cruciale du cerveau joue un rôle clé dans les fonctions exécutives, par exemple la résolution de problèmes, la capacité à effectuer des changements entre différentes tâches, la concentration, l’attention sélective et le blocage des interférences.
Selon Mia Nacamulli, une communicatrice scientifique spécialisée dans le fonctionnement du cerveau, même si le bilinguisme ne rend pas les gens plus intelligents, il transforme littéralement le cerveau en le rendant plus complexe et plus actif. Et ce privilège n’est pas réservé qu’aux enfants! Il n’est jamais trop tard pour apprendre une nouvelle langue.
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