L’arthrite est une maladie à la fois répandue et pourtant encore méconnue. Une des méprises les plus courantes à ce sujet est que la condition touche uniquement des gens du 3e âge. En fait, elle peut atteindre les gens de tous âges, incluant de très jeunes enfants.
Elle s’attaque même le plus souvent à des personnes dans la force de l’âge, rendant la gestion de la famille et de la carrière d’autant plus difficile.
Voici quelques faits et statistiques pour en apprendre plus sur l’arthrite, ainsi que le parcours de la championne olympique Nathalie Lambert, qui nous a raconté son histoire lors d’une récente table ronde tenue à Montréal et intitulée «La polyarthrite rhumatoïde importe au travail».
Quelques faits sur l’arthrite
L’arthrite est la maladie chronique la plus répandue au pays.
Il existe de nombreuses formes d’arthrite, incluant :
- L’arthrose, la forme la plus courante. Il s'agit d'une maladie «d’usure» qui cause la dégradation du cartilage et des os qui se trouvent en-dessous.
- L’arthrite juvénile, une forme de la maladie qui touche 3 enfants sur 1000.
- L’arthrite inflammatoire, où le système immunitaire d’une personne s’attaque aux tissus articulaires.
- La polyarthrite rhumatoïde, une maladie auto-immune sévère qui s’attaque aux articulations, mais également à d’autres organes comme les yeux, les poumons et le cœur. Elle peut avoir une progression plus ou moins rapide et parfois fulgurante!
Les femmes sont plus nombreuses à recevoir un diagnostic d’arthrite, mais ça dépend des formes. L’arthrose, par exemple, affecte autant d’hommes que de femmes tandis que les formes auto-immunitaires sont beaucoup plus associées aux femmes.
Au Québec, 1,3 million de personnes souffrent d’une forme d’arthrite, dont une femme sur quatre!
Environ 300 000 Canadiens souffrent de polyarthrite rhumatoïde, la forme la plus sévère. En plus des douleurs et raideurs articulaires, cette forme cause une grande fatigue chez les patients, ainsi qu’une perte de capacité fonctionnelle.
Un travailleur canadien sur 10 éprouve de la douleur liée à l’arthrite; la maladie est une cause majeure d’invalidité professionnelle au pays.
34 % des Québécois atteints d’arthrite doivent limiter leurs activités au quotidien à cause de la douleur.
Il existe des traitements et des médicaments qui sont efficaces, mais on ne peut pas guérir de l’arthrite.
L’histoire de Nathalie Lambert
Pierre Bourgault Photo
Nathalie Lambert raconte son parcours avec l'arthrose à Marie-Ève Laforte, rédactrice pour Canal Vie
Peu d’athlètes ont un parcours aussi impressionnant que celui de Nathalie Lambert! Elle a fait du patin de vitesse pendant 22 ans, participant à 3 Jeux Olympiques et remportant 4 médailles, en plus d’avoir agi comme chef de mission canadienne pour les Jeux de Vancouver en 2010.
Aujourd’hui âgée de 55 ans, cette femme très inspirante est toujours active et débordante d’énergie! Mais peu de gens connaissent les ennuis de santé qu’elle a éprouvé après sa retraite du patin, dus à de l’arthrose sévère.
Ayant commencé l’entraînement à l’âge de 12 ans, elle a très rapidement constaté des douleurs et de l'enflure aux genoux. Dès l’âge de 20 ans, elle souffrait d’arthrose, et devait s’en tenir aux anti-inflammatoires ainsi qu’aux infiltrations de cortisone pour pouvoir fonctionner. Nathalie Lambert attribue son arthrose à différentes causes : sa croissance rapide au moment où elle s’est mise à s’entraîner intensivement, une génétique qui n’était probablement pas optimale pour pratiquer son sport ainsi qu’un surentraînement chronique qui, explique-t-elle, correspondait à la philosophie de l’époque.
Pendant 25 ans, l’athlète a vécu en mode « gestion de la douleur », pour un problème qui est devenu de plus en plus incapacitant. Dans la quarantaine, alors qu’elle avait de jeunes enfants, elle arrivait difficilement à se tenir debout et immobile pendant plus de quelques minutes à la fois, à marcher pendant plus que quelques pâtés de maison, à faire de la randonnée qu’elle aimait pourtant beaucoup…
Nathalie a depuis subi plusieurs chirurgies, incluant un remplacement des deux genoux. Elle a pu retrouver une vie normale, avec quelques exceptions près –elle qui travaille aujourd’hui comme directrice des programmes sportifs du Club MAA à Montréal ne peut plus pratiquer d’activités avec des mouvements rapides d’accélération et d’arrêt, comme la course, mais également le tennis et le squash! Elle est toutefois très soulagée de pouvoir effectuer des gestes importants du quotidien que les personnes en santé prennent souvent pour acquis : se lever, sortir de la voiture, se mettre à genoux…
Comment reconnaître les symptômes et quoi faire
Les symptômes les plus courants de l’arthrite sont des douleurs aux articulations (par exemple les genoux, les hanches, les épaules, les poignets ou les mains) qui persistent pendant plus de 6 semaines. Une seule ou plusieurs articulations peuvent être affectées et la douleur peut se présenter de manière symétrique (des deux côtés du corps) ou pas.
Ces douleurs peuvent également s’accompagner de raideurs, de rougeurs, d’enflure et même de fièvre légère. Souvent, les douleurs sont pires après le lever et s’atténuent pendant une période d’activité.
Le conseil le plus important de Nathalie Lambert, c’est de ne pas attendre pour consulter! S’il y a présence de douleur persistante, cette dernière ne va pas d’en aller. Plus l’arthrite est prise en charge rapidement et meilleure sera la qualité de la vie de la personne.
De la même manière, il est important de ne pas remettre les chirurgies de remplacement (par exemple des genoux ou des hanches) à plus tard, simplement sous l’impression d’être encore « trop jeune » pour le faire. Encore une fois, malgré la croyance populaire, ce type d’intervention n’est pas seulement destiné aux personnes âgées! Ces chirurgies sont primordiales pour pouvoir retrouver un maximum de capacité fonctionnelle.
Selon Nathalie Lambert, c’est également très important de ne pas abandonner la pratique de l’activité physique, malgré la douleur. Si une personne cesse d’être active, ses muscles vont s’atrophier, causant ainsi encore plus de difficulté à effectuer des mouvements simples ou à supporter le corps. Cela cause une perte d’autonomie et de mobilité de plus en plus grande, créant ainsi un cercle vicieux.
L’ajustement difficile en milieu de travail et pour la famille
La polyarthrite rhumatoïde peut survenir à tout âge, mais apparaît la plupart du temps dans la quarantaine et la cinquantaine, soit la période la plus productive d’une carrière. Et les symptômes reliés, comme la fatigue et la douleur mais aussi le stress et l’imprévisibilité de la condition rendent la charge de travail beaucoup plus difficile.
Les personnes souffrant de polyarthrite rhumatoïde doivent donc souvent s’absenter du travail ou encore faire du « présentéisme »; elles se sentent isolées et leur condition n’est pas très bien comprise par leurs collègues ou encore leurs supérieurs. Malheureusement, 20 % des personnes atteintes par la maladie arrêtent de travailler dans les 5 ans suivant leur diagnostic.
L’approche de traitement aujourd’hui est plus globale, travaillant en prévention et dans toutes les sphères de la vie de la personne atteinte afin d’essayer de la garder en poste le plus longtemps possible. Les gens aux prises avec la polyarthrite rhumatoïde ont donc besoin d’un soutien et d’un accompagnement, au travail comme à la maison –étant donné qu’occuper un emploi de ne se produit pas dans un contexte isolé.
Une bonne prise en charge sera donc non seulement médicale, mais inclura aussi un support de l’employeur (avec des accommodements possibles comme la réduction des heures de travail ou des congés ponctuels), un ajustement des attentes à la maison ainsi que la participation de tous les membres de la famille aux tâches quotidiennes, du temps de repos pour la personne atteinte et même un bon suivi psychologique. Souffrir d’arthrite affecte en effet l’humeur et peut avoir des répercussions sur la santé mentale; 40 % des personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde ont vécu au moins un épisode dépressif.
Il y a heureusement de nombreux exemples positifs et inspirants de personnes atteintes d’arthrite, comme Nathalie Lambert! Malgré les défis reliés à la condition, retrouver un certain équilibre est possible et il ne faut jamais perdre espoir.