Chaque jour en Europe, des patients se font opérer sans être complètement anesthésiés. La douleur de l'opération est contrôlée grâce à une technique douce, l'hypnose médicale.
La Société québécoise d'hypnose (SQH), une OBNL regroupant médecins, dentistes, psychologues et psychothérapeutes reconnus par l'Ordre des psychologues de Québec a pris naissance en 1983 afin d'offrir au public cette technique de soin tout en profitant de la protection des ordres professionnels légiférant la conduite des professionnels. Les opérations sous hypnose ne sont cependant pas encore généralisées au Québec, contrairement à ce qui se passe sur le vieux continent où au seul centre hospitalier de Liège plus de 9 000 opérations sous hypno-anesthésies ont été réalisées depuis 2000.
Pour en savoir plus sur l'hypnose médicale, Canal Vie a interviewé Jacques Desaulniers, psychologue et président de la SQH. Il pratique l'hypnose médicale depuis plus de vingt ans.
C'est quoi l'hypnose médicale?
Tout d'abord, il est important de préciser que l'hypnose médicale n'a rien à voir avec l'hypnose telle que la pratique l’illusionniste Messmer par exemple, il s'agit dans son cas de ce qu'on appelle l'hypnose de scène. Précisons que l'hypnose médicale est avant tout de l'auto-hypnose.
Quel en est le principe?
Elle consiste à présenter au patient des suggestions que le cerveau peut accepter et utiliser afin de mieux prendre soin du corps, en l'occurence des suggestions agréables, ce qui va faire en sorte qu'il va se détourner de la zone de douleur. On peut donc suggérer au patient de penser à un lieu de confort, de se rappeler d'un moment agréable pour l'aider à générer un vécu plus confortable.
Pourquoi est-ce que ça fonctionne?
Le corps est fait pour se soustraire à la douleur donc si on l'accompagne de la bonne façon, si on l'aide, il lui devient possible de détourner son attention et de générer d'autres types de réactions physiques. La douleur en réalité, c'est juste une façon de nous prévenir d'un danger, mais quand on est chez le dentiste par exemple, nous ne sommes pas en danger de mort, donc la douleur ne sert pas à grand chose dans cette situation.
Dans quel genre d'intervention peut-on utiliser l'hypnose médicale?
Dans des interventions légères, mais aussi pour des opérations plus lourdes de chirurgie. Dans ce cas, en Belgique et ailleurs, on ne donne au patient qu'un quart environ de la dose sédative tout en le maintenant en hypno-anesthésie.
Qui pratique l'hypnose pendant une opération?
C'est la plupart du temps le médecin-anesthésiste qui a été formé à cette technique. Pendant l'opération, il va maintenir le patient en état de transe en lui parlant, utilisant ce qu'on peut appeler une forme d'hypnose conversationnelle. Le reste du personnel qui participe à ce genre d'opération a aussi été formé à l'hypnose. Les salles d'opération où l'hypnose est utilisée sont d'ailleurs beaucoup plus silencieuses, les gens parlent moins fort, l'atmosphère globale est plus feutrée.
Quels sont les avantages de l'hypnose médicale?
Il y en a beaucoup. Tout d'abord, c'est plus agréable non seulement pour le patient, mais aussi pour le personnel. Si je prends l'exemple d'un enfant à qui on doit poser un cathéter sans hypnose, c'est une opération qui peut être «sportive» et nécessiter plusieurs membres du personnel pour le maintenir immobile. La même procédure sous hypnose se passera de façon beaucoup plus douce. L'hypnose permet aussi de réduire les saignements, chez les dentistes, on observe qu'il y a moins de salivation, ce qui facilite le travail.
Quelle est la situation de l'hypnose médicale au Québec?
Nous sommes encore très loin de ce qui se passe en Europe où l'hypnose médicale est très pratiquée, mais les choses sont en train de changer, il y a d'ailleurs des études cliniques qui seront bientôt entreprises, plusieurs groupes de recherches sont en place dans divers établissements hospitaliers et je suis confiant que l'utilisation de cette sera davantage utilisée dans les années à venir, au grand bénéfice des patients et du personnel clinique.