En cette 2e année de pandémie, à quoi ressembleront les tendances bouffe? Si 2020 nous a amené le pain maison et la bouffe réconfort, le portrait pourrait être légèrement différent en 2021.
On se rappelle que l’industrie de la restauration a été l’une des plus durement touchées par la COVID-19 et les confinements successifs – et c’est loin d’être fini! Mais l’impact de la pandémie va au-delà des restaurants: juste autour de moi, une pâtissière d’événements et un traiteur, tous deux exceptionnellement talentueux et avec des entreprises solides et renommées, ont décidé fermé boutique dans les derniers mois.
C’est donc dans ces circonstances très particulières que je peux énoncer ce que je vois comme les tendances bouffe importantes qui marqueront cette année.
1. Les soupers gastronomiques à la maison
Ce n’est pas parce que les gens sont « pris » à la maison qu’ils souhaitent toujours manger des repas ordinaires… Et plusieurs restaurateurs ont bien compris ce besoin des consommateurs d’ajouter un peu de « spécial » dans la routine.
C’est ainsi que plusieurs restos réputés, par exemple le Pastaga du chef Martin Juneau ou encore le India Rosa à Montréal, ont adopté cette formule : proposer des plats, des boîtes ou des repas fancy en version à préparer/réchauffer à la maison. En photo, salade de pieuvre et couscous israélien.
2. Les repas « expérience »
Alors que les gens ne peuvent plus aller au restaurant, j’ai vu plusieurs initiatives intéressantes et intrigantes qui permettent quand même aux convives de sortir de chez eux, d’avoir une « date » et de partager un bon repas.
Avant Noël, plusieurs hôtels ont commencé à proposer des soupers préparés par leurs chefs dans une de leurs chambres, louée que ce soit seulement pour quelques heures ou encore pour la nuit, selon une formule plus traditionnelle.
L’Auberge Saint-Antoine à Québec a retenu mon attention pour avoir poussé cette formule encore plus loin : certaines chambres avec terrasses disposent de mini-serres chauffées dans lesquelles les invités peuvent déguster un repas 3 services, avec vue imprenable. Assez magique n’est-ce pas?
Ailleurs dans le monde, les restos, cafés, auberges et cie, ont mis sur pied des initiatives similaires : souper dans un conteneur rénové, mini-bulles de verre installées dehors, etc.
3. L’alcool québécois
En 2017, il y avait une quinzaine de distilleries au Québec. Maintenant, il y en a plus de 60! On fait beaucoup de gin, mais aussi de la vodka, du whisky, des liqueurs, ainsi qu’une nouvelle particularité de chez nous, l’acérum. Il s’agit d’eau-de-vie à base d’érable, qui selon des sources (pas si) secrètes, pourrait bien connaître un certain rayonnement international et devenir le prochain cidre de glace.
Il y a maintenant tellement d’excellentes options qu’il n’y a plus aucune excuse pour ne pas se constituer un beau petit bar (presque) local. C’est un milieu en pleine effervescence, et la création de cocktails qui célèbrent notre terroir et nos saveurs nordiques est tellement intéressant et satisfaisant!
4. Les mocktails
Le revers de la médaille, c’est qu’en temps de pandémie, autant il y a de gens qui s’automédicamentent avec une consommation d’alcool plus élevée que d’habitude, autant d’autres décident consciemment de réduire, voire même de cesser leur consommation, pour X raisons (donner une p’tite chance à leur santé mentale, par exemple).
Les cocktails sans alcool (ainsi que, dans un même ordre d’idée, les cocktails à faible teneur en alcool, qui sont également de plus en plus populaires) deviennent un « art » à part presque égale… Avec autant de recherche d’ingrédients de qualité, de complexité des saveurs et d’attention aux détails que pour la mixologie traditionnelle.
5. Le « takeout » solidaire
Fermeture des salles à manger oblige, les repas à emporter ont pris une ampleur démesurée dans les derniers mois. Mais à part leur popularité, ce que je trouve significatif est le fait que le « discours » autour du takeout est maintenant différent.
Dans le sens où, depuis des années, tout ce qu’on entend est l’importance de cuisiner plus à la maison et de revenir à la base. Commander du resto était, si on pousse un peu, mal vu, considéré comme « pas santé, » cher, etc.
Mais la pandémie a tout changé. Commander du resto maintenant, c’est presque un geste patriotique. C’est faire sa part pour l’économie locale et encourager les commerces du quartier. C’est permettre à nos endroits préférés de continuer à survivre. Ce n’est pas rien!
6. Les cours de cuisine virtuels
Les gens cuisinent plus depuis la pandémie, c’est indéniable. Ils sont également à la recherche de passe-temps et d’exutoires. Ces deux facteurs ont permis a un grand nombre de personnes d’avoir « cliqué » avec la cuisine dans la dernière année, que ce soit en général ou avec un de ses aspects plus spécifiques (le pain, la pâtisserie, la cuisine italienne, etc.)
Et donc, ceux-ci sont devenus avides d’en apprendre plus et d’améliorer leurs techniques. Mais, comme les vrais cours de cuisine sont exclus –et le seront certainement pour la majeure partie de 2021 -, la seule option qui nous reste est de se tourner vers le monde virtuel, une fois de plus.
Ça permet en plus à plusieurs pros de la cuisine de continuer à vivre, alors tant mieux!
7. Le « plant-based »
Les produits d’origine végétale n’ont jamais été aussi populaires et acessibles! Un seul exemple parmi tant d’autres est le lait d’avoine, devenu un peu l’emblème de la boisson végétale « idéale », avec son goût léger et plaisant, son empreinte écologique faible comparé au lait d’amandes et son côté plus accessible que le lait de soya – qui est un allergène important… Si comme moi vous l’avez adopté, vous avez peut-être remarqué que souvent durant la pandémie, les tablettes d’épiceries en étaient vides, alors que toutes les autres options de lait, végétal ou de vache, étaient bien garnies!
Mais ce que je voulais surtout faire remarquer, c’est à quel point ça a changé vite : l’appellation « à base de plantes » est devenue une stratégie efficace et même désirable pour les compagnies. Ça veut dire que les équipes de marketing ont compris que le public considère que cette appellation a une valeur ajoutée. Comme c’est toujours le cas, on voit même maintenant cette appellation sur des sources vraiment évidentes : par exemple, des pistaches, qu'on annonce comme « une source de protéines à base de plantes ». Je veux dire, wow, dah! C’était un peu la même chose quand le sans gluten est arrivé et que des aliments qui n’en ont jamais contenu, comme du riz ou des croustilles, se sont mis à s’afficher comme tel.
8. Les services de livraison
Il y a à peine quelques années, si on voulait faire livrer de la bouffe, il fallait appeler au resto. Ce modèle existe bien sûr encore, mais il est en train de se faire éclipser par une nouvelle manière de faire : celle des services de livraison qui impliquent des gens dans leur propre auto qui se rendent au resto chercher personnellement votre commande pour aller ensuite la porter chez vous. Les Uber Eats, Door Dash, Skip the Dishes et autres sont en train d’étendre leurs tentacules, non sans controverse (à cause de certaines pratiques commerciales discutables et de la précarité des travailleurs, entres autres). L’avantage pour les clients est bien sûr d’avoir accès à une énorme variété de bouffe, en dehors des canaux traditionnels de livraison (pizza, poulet BBQ, mets chinois, etc.)
Ce phénomène n’est peut-être pas encore répandu au Canada, mais, aux États-Unis il a mené à la création de « cuisines fantôme », c’est-à-dire, de cuisines commerciales qui ne sont pas attachées à une salle à manger, ni même à un unique restaurant, mais qui servent plutôt à remplir les commandes des clients à mesure qu’elles arrivent. De plus en plus, ces cuisines combinent également des plats de différents restos, ce qui permet de rendre les commandes plus « efficaces ».
Certains restaurateurs voient ce nouveau modèle comme une opportunité (de réduire les coûts tout en faisant quand même connaître leur nourriture, par exemple), tandis que beaucoup d’autres dénoncent cette standardisation extrême et cette « dénaturation » de l’expérience du resto.
9. Le respect de l’origine des aliments
2020 a secoué bien des choses, amenant sur la table (haha) les concepts d’appropriation culturelle, ainsi que de racisme systémique.
Le balado « On s’appelle et on déjeune » a récemment parlé du concept d'appropriation culturelle qui fait maintenant partie du paysage culinaire dans un épisode qui suscite la réflexion. Mon amie Caroline, alias Loounie, m’a également pointé vers un article du magazine Bon Appetit sur le même sujet, qui réunit deux auteures de livres de recettes, une d’origine indienne et une provenant du Nigeria. Leur point de vue est très intéressant. Elles expliquent, par exemple, leur malaise lorsque les gens leur demandent sans cesse des substitutions d’ingrédients qui n’ont pas vraiment de sens, afin de s’aligner avec leurs palais moins « aventuriers ».
Qu’est-ce qu’il faut faire, alors? Bien, il n’y a pas de solution miracle, mais peut-être juste être plus conscient? S’intéresser à l’origine réelle d’un plat, essayer d’apprécier la culture dans lequel il a été produit et rechercher l’authenticité plutôt que les compromis. Ça a du sens?
10. L'influence de TikTok
D’où provenaient presque toutes les petites tendances bouffe qui ont explosé en 2020, comme le café Dalgona ou les mini-biscuits céréales? De TikTok. Si quelqu’un doute encore de la pertinence de ce (relativement) nouveau réseau social, c’est le temps d’y croire.
La facilité et la cadence particulière de ce média le rend vraiment propice à communiquer des hacks, trucs faciles et tendances éclair à grand potentiel de viralité. Il faut définitivement surveiller ce qui en sortira en 2021!