Je le dis souvent, mais manger, c’est tellement plus que se nourrir. Il y a beaucoup de facteurs qui entrent en jeu dans notre assiette et souvent, on n’en est même pas conscients!
Les envies très fortes d’un aliment ou d’un type d’aliment spécifique (des cravings, de l’anglais, comme on dit souvent puisque l’expression en français ne rend pas tout à fait le même sens), c’est réel. Et ça peut différer selon les personnes, mais en règle générale on va se le dire, c’est rarement pour du brocoli. Les cravings, c’est habituellement envers des aliments qui ne sont « pas bons » pour nous : que ce soit du sucré, du salé ou du gras (ou une combinaison de deux de ces types d’aliment).
D’où viennent les cravings?
Les envies alimentaires sont contrôlées par notre cerveau. En fait, toutes nos impressions de faim et de satiété viennent de là : quand on a terminé de digérer un repas, notre hypothalamus reçoit un message de relancer l’appétit. C’est l’hypothalamus qui contrôle nos fonctions de survie les plus de base : la faim, la soif, le sommeil et la régulation de notre température.
Mais les cravings ne fonctionnent pas de la même manière. Une envie très forte de malbouffe par exemple (salé + gras) n’est pas reliée à notre survie… Cette envie passe donc par différents endroits du cerveau, mais entre autres par le système de plaisir et de récompense, qui est également relié à l’addiction. Quand on a un craving de bouffe, c’est donc exactement la même chose que quelqu’un qui vient d’arrêter de fumer par exemple!
En gros, les cravings ne sont pas tant reliés à la faim, mais beaucoup plus à nos émotions ainsi qu’à des mécanismes plus profonds.
C’est également intéressant de savoir que les cravings sont assez genrés! Les femmes en font l’expérience dans une proportion deux fois plus grande que les hommes –ce qui soutiendrait la théorie hormonale expliquée ci-bas, puisque les femmes vivent des fluctuations beaucoup plus grandes que les hommes à ce niveau. Et les envies spécifiques sont même plus prévisibles selon le genre : les femmes sont plus portées sur le sucré et les hommes sur le salé et le gras!
Des explications
Différents cravings peuvent avoir différentes causes, mais voici quelques pistes d’explication.
Les hormones : Certaines fluctuations d’hormones peuvent expliquer des cravings, par exemple lorsque les femmes sont dans leur SPM. Les envies étranges ou très spécifiques chez les femmes enceintes sont aussi très réelles et très intenses, pour cette même raison!
Un déséquilibre hormonal peut de plus expliquer certains cravings : c’est le cas chez plusieurs personnes qui développent une résistance à la leptine (régulateur de notre appétit) ou dont le taux de sérotonine (joueur important dans plusieurs maladies mentales) est trop bas.
Les émotions : C’est le cas dans certains cravings dont on sait qu’ils nous apporteront (temporairement) du réconfort. Ceci peut remonter à loin : peut-être que lorsque vous étiez enfant, quelqu’un vous a donné un gros bol de crème glacée alors que vous vous sentiez tristes et que ce dernier vous a permis de mieux feeler! Votre cerveau a peut-être ainsi fait cette association et la recherche encore lorsque vous n’avez pas une bonne journée (ou une bonne période).
Les besoins en nutriments : Il y a également une théorie voulant que nos envies alimentaires peuvent correspondre à ce dont notre corps a besoin mais ne reçoit pas! Par exemple, un craving pour manger du chocolat pourrait dans certains cas signifier que notre corps a besoin de plus de magnésium (puisque le chocolat noir en contient). De la même manière, une envie très intense de viande rouge pourrait être expliquée par une carence en fer. Les cravings pour de la bouffe très salée, par exemple des croustilles, pourraient de plus émaner d’un taux de sodium trop bas dans l’organisme, à cause d’une médication ou suite à un exercice intense, par exemple.
Le contexte : Si l’on est habitué à manger ou boire un aliment dans un certain contexte, notre cerveau peut se mettre à le « réclamer » par la suite lorsque ce même contexte resurgit… Par exemple, dans le cas de manger du maïs soufflé en regardant un film, de manger des grignotines chaque fois que l’on prend une bière, etc.
Est-ce que les cravings sont graves?
Ma première réponse instinctive, c’est… non! Dans le sens où dans bien des cas, les cravings occasionnels ne sont pas dommageables pour notre santé. Je pense par exemple à mon amie bloggeuse (et nutritionniste) Cynthia Marcotte, qui ne peut tout simplement pas passer une journée sans manger du chocolat. C’est une fille ultra en forme, qui s’entraine, qui mange bien la majorité du temps et qui respire la vitalité et la santé!
Tout ça pour dire que le but ultime dans notre alimentation, ça devrait toujours être « d'entretenir une relation saine avec la nourriture ». Être dans une optique de restriction, d’interdiction et de honte par rapport à nos petites envies alimentaires permet rarement d’atteindre ce but. C’est exactement pour cette raison que j’ai mis des guillemets dans l’expression aliments « pas bons » pour nous en introduction de ce texte : je voudrais être bien claire sur le fait que dans l’absolu, je crois qu’aucun aliment n’est intrinsèquement « mauvais » pour nous.
Personne ne devrait viser la perfection absolue dans son alimentation et les « cravings » peuvent très bien s’intégrer là-dedans, dans une logique d’équilibre global et de petit plaisir.
Quand les cravings sont moins sains…
Ceci étant dit, il peut arriver que ce type d’envie irrésistible puisse devenir plus problématique, soit par leur fréquence, leur intensité ou leur caractère plus « compulsif ». Si vous sentez que vous êtes en déséquilibre, il existe certains trucs qui permettent de mieux faire face à ces situations.
Le premier truc, ce serait bien sûr d’être à l’écoute de votre corps. Avez-vous l’impression que ce dernier essaie de vous faire comprendre quelque chose? Que vous êtes fatigué ou trop stressé par exemple? Ce sont deux facteurs qui, vous le savez déjà, peuvent mener à des cravings assez irrépressibles. Il n’existe malheureusement pas de solution miracle mais un truc pourrait être de considérer votre bien-être de manière plus générale et d’essayer de pallier à ces manques : en prenant un cours de yoga, et évitant le binge watching régulier le soir, etc.
Le deuxième truc, c’est de reconnaître vos propres patterns. Ça paraît anodin, mais c’est déjà un grand pas pour y faire face. Par exemple dans mon cas, je sais qu’il y a une « heure creuse » durant la journée (entre disons 16 :30 et 18 :00) où je suis particulièrement vulnérable à manger tout et n’importe quoi, d’une manière assez incontrôlée. Incluant des choses qui ne sont « pas bonnes » pour moi -pas parce que je crois que je ne devrais pas avoir le droit de les manger, mais qui s’appliquent à ma situation spécifique- par exemple, des bonbons alors que ce type d'aliment amplifie directement mon anxiété.
Intégrer des probiotiques dans son alimentation pourrait également faire partie de la solution. Ça peut sembler étrange, mais il existe bel et bien un système de communication entre notre système digestif et notre cerveau. Certaines variétés de bactéries nuisibles peuvent donc envoyer des signaux qui nous (leurs hôtes) donnent envie de manger certains aliments (par exemple sucrés), qui leur permettent en fait de s’alimenter et de se multiplier! La solution consiste à rééquilibrer et enrichir/diversifier notre microbiote.
Boire beaucoup d’eau, manger plus de protéines (qui procurent un sentiment de satiété pendant plus longtemps), avoir une bonne hygiène de vie en général et « déjouer » son cerveau (en mâchant de la gomme, en faisant autre chose le temps que l’envie passe, en allant chercher du réconfort autrement, etc.) sont toutes des stratégies qui peuvent aussi fonctionner.
Chose certaine, notre rapport avec la nourriture n’est pas simple et il faut surtout éviter de se flageller si on « cède » à un craving. Il vaut mieux plutôt penser à toutes les occasions où on a fait un choix gagnant et passer au suivant!