La pandémie de la COVID-19 éveille en soi des sentiments qu’on ne pensait pas possibles, il y a de cela quelques semaines. On devient suspicieux de l’autre; on se sent observés, analysés. Malgré tout, la tolérance doit être de mise en ces jours où l'on doit, plus que jamais, être solidaires.
Un virus qui engendre la peur des autres
Au tout début de l’épidémie du nouveau coronavirus, la population asiatique a été pointée du doigt. Ceux originaires de cette région du monde, mais également ceux, Québécois de souche, qui ont des traits distinctifs. D’ailleurs, la commission scolaire associée aux écoles que fréquentent mes filles avait alors fait parvenir un courriel à tous les parents en leur demandant : «de ne pas propager des rumeurs sur le nouveau coronavirus qui pourraient attiser la xénophobie contre la communauté chinoise.» L’objectif de ce message était de prévenir des comportements haineux liés au coronavirus. Évidemment, la peur engendre parfois d'étranges réactions. On oublie de comprendre la source du problème et on suspecte un peu n’importe qui.
C’était il y a si longtemps… au début du mois de février.
La peur s’est ensuite transférée vers tous les voyageurs, alors que c’était dorénavant eux, qui pouvaient être porteurs du virus. Certains ont accusé, sur les réseaux sociaux, les parents d'être irresponsables, ceux qui avaient envoyé leurs enfants à l’école au retour d’une semaine de relâche à l’étranger. On oubliait de se remémorer qu’à ce moment, les yeux étaient rivés vers la Chine et l’Italie principalement.
Par la suite, ce sont les snowbirds qui sont rentrés au bercail qui ont été accusés de transporter le virus avec eux dans leur valise. Bien sûr, il y a eu quelques cas isolés d’individus qui ne prenaient pas les recommandations du gouvernement au sérieux, et qui arrêtaient dans la première épicerie qu’ils croisaient en sol québécois. Toutefois, la majorité des gens se sont rendus à leur résidence, demandant de l’aide pour avoir à leur arrivée le nécessaire pour se nourrir durant quelques jours.
Maintenant se sont les groupes religieux qui sont ciblés. Entre autres, on lit une nouvelle qui parle des juifs ultraorthodoxes et l’on croit qu’ils sont tous responsables des explosions de cas dans les grands centres urbains. Encore une fois, il s’agit d’une minorité qui a tardé à entendre les consignes. L'ensemble de la population juive n'a pas à être jugé en fonction d’un groupe précis. Les messages haineux n’ont jamais leur raison d’être.
Dans tous les cas, rien ne sert de douter de son voisin, peu importe ses origines ethniques, ses habitudes de voyages, sa religion… Il faut plutôt s’ouvrir, accepter la différence et essayer de la comprendre.
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La peur de l’autre et la peur de soi-même
Même si l’on voit partout : ça va bien aller, la peur de l’autre prend une étrange propension et elle s’immisce sournoisement dans les moindres détails de notre vie. Tout à coup, on est moins tolérants, plus méfiants.
Je respecte, avec ma famille, les règles de confinement. Je reste chez moi et les seules sorties demeurent des promenades à pied dans mon quartier. Néanmoins, on doit continuer de s’alimenter et pour ce faire, je dois aller à l’épicerie.
Et voilà que le malaise m’envahit. Le virus peut être partout et nulle part. Moi-même, je deviens une source potentielle de propagation de la COVID-19. Est-ce que j’ai bien compté les 20 secondes réglementaires de lavage des mains à l’entrée de l’épicerie ou suis-je allée un peu trop vite? Pourtant, je n’ai aucun symptôme, et aucune raison de penser que je pourrais avoir la maladie, mais peut-être suis-je asymptomatique? Je me mets à douter de moi-même!
Mais, celui qui se trouve en avant de moi dans l’allée peut tout aussi bien être une source de propagation. Même si on se sourit, on sait très bien tous les deux qu’on se questionne, sur soi et sur l’autre. Ça crée un malaise généralisé.
À celui-ci s’ajoute le questionnement sur ce que l’on achète ou pas. J’ai 4 enfants, alors mon panier est toujours bien rempli. Jamais je ne me suis sentie jugée à cet effet. Cependant, depuis le début du confinement, depuis qu’il y a eu, entre autres, la course folle au papier de toilette et aux denrées non périssables, je sens le regard des autres en analyser le contenu. Une fois rendue à la caisse, ç’a été plus fort que moi et j’ai lancé : «vous savez, c’est que… j’ai 4 enfants!» Ces mots ont eu une drôle de résonnance en moi. En sommes-nous rendus à justifier nos achats? Je repars avec un étrange mal de tête. La COVID-19 ou le stress d’une sortie à… l’épicerie?
Une peur qui bascule vers les personnes âgées
Je téléphone ensuite à mon grand-père pour prendre de ses nouvelles. À 85 ans, il est en pleine forme. Il vit seul dans sa maison, qui est toujours impeccable, mais qui doit l’être plus que jamais puisqu’il s’occupe en faisant le grand ménage! Ah! La mienne en aurait bien besoin! Bref, il passe son temps comme il peut et respecte aussi les règles de confinement. Il avait l’habitude d’être très actif, mais il ose de moins en moins sortir de chez lui, même pour aller marcher dans son quartier. Il n’a pas peur de la COVID-19, mais plutôt du regard des autres. Vraiment? C’est troublant, ça aussi! On a tous besoin de sortir, de s'aérer l'esprit comme on le peut. Et les personnes âgées conservent les mêmes droits que nous tous, qui sommes en santé.
Mais, il y a confusion dans la population.
Il a pourtant été répété dans les médias comme dans les points de presse quotidiens que les personnes âgées ne sont pas plus susceptibles d’être un vecteur de propagation que n’importe qui d’autre dans la société. Le risque se situe davantage au niveau des complications si elles contractent la maladie. Les consignes sont effectivement plus strictes pour celles qui vivent dans un CHSLD puisque la situation y est différente étant donné la proximité de gens qui y habitent et de l'état de santé de ceux qui doivent y recevoir des soins. Cependant, toutes les personnes âgées qui demeurent dans leur maison et qui sont en bonne santé ont le droit de sortir dehors, respirer le grand air, écouter les oiseaux chanter, vivre un peu... Alors, si on croise l'une d'entre elles, elle mérite davantage notre plus beau sourire qu’un regard suspicieux ou encore des paroles désobligeantes.
Bref, la peur a d'abord ciblé ceux qui semblaient loin de nous, en pointant du doigt un pays, mais elle s’est rapprochée petit à petit et on s'est mis à avoir peur de son voisin… mais également de soi-même. Pourtant, la peur ne sert à rien. Il faut plutôt s’informer, se documenter auprès de sources fiables, mais surtout, il faut ouvrir son cœur.
Alors, demeurons prudents, respectons les consignes émises par notre gouvernement, mais n’oublions pas d’entretenir la tolérance face à la différence et surtout... face à ses voisins!