Les questionnements tourbillonnent dans ma tête depuis que tout s’est arrêté le fameux vendredi 13 mars. Un peu comme tout le monde, je passe par toutes sortes d’émotions. Sur le moment, ce ralentissement planétaire m’a semblé bénéfique. Ensuite, j’ai trouvé que cet arrêt s’éternisait et que les contraintes finissaient par nous étouffer, nous freinaient dans notre spontanéité. Face à un mur et, coincée entre 4 murs, je ne pouvais que m’y cogner sans arrêt. Je me suis questionnée, encore. Et si la pandémie faisait en sorte que l’on redevienne soi-même?
Un regard différent sur la société de performance et de surconsommation
Dans notre société, on est plusieurs à courir comme des hamsters dans leur roue. On court, et on ne sait plus exactement où l’on s’en va. Avec la pandémie, c’est un peu comme si la roue s'était arrêtée tout d’un coup. J’imagine ce pauvre petit hamster être propulsé par cet arrêt soudain. Une fois sorti de cette roue, il prend toutefois le temps de regarder tout autour. Cette roue lui semblait nécessaire, elle lui procurait même un bien immense, mais s’il ne vivait pas dans une cage, en aurait-il besoin?
Des restrictions qui apportent des problématiques, mais qui mettent en lumière nos véritables besoins
Bien sûr, rien n’est tout noir ou blanc. La cage peut être la pression imposée par la société, comme les contraintes associées à la pandémie. Celles-ci engendrent leur lot de problématiques. On voit d’ailleurs le niveau d’anxiété augmenter chez plusieurs, tout comme la santé mentale qui se détériore. On vit tous le confinement d’une manière différente, confrontés à une réalité qui nous est propre.
Malgré tout, sans négliger les impacts négatifs de l’isolement chez plusieurs personnes, je remarque que la pandémie a le pouvoir de mettre la lumière sur ce que nous sommes vraiment et ce dont nous avons réellement besoin. Comme si tout à coup, des éléments négligés dans le passé se trouvaient maintenant en surbrillance. Il est impossible de ne pas les voir, de ne pas les ressentir. Il en va de même avec nos forces et nos faiblesses. On le voit à plus grande échelle, au sein de la société, mais il en est de même en chacun de nous.
Une perte d’aptitudes sociales ou un retour vers soi?
Au même instant, alors qu’on pourrait penser que l’on perd nos aptitudes sociales, je crois, plus que jamais, que l’on prend conscience que nous sommes des êtres sociaux.
Après une année à vivre sur l’eau, j’avais justement eu cette même réflexion. Avais-je perdu mes habiletés sociales? Un peu comme si je ne parlais plus le même langage que mon entourage... Pourtant, durant ces mois à naviguer lentement, à vivre entourée d’eau au quotidien, j’avais fait des rencontres extraordinaires. En l’espace de quelques heures, je réussissais à créer des liens sincères avec d’autres humains. À l’opposé de cette réalité, une fois de retour sur la terre ferme, je n’arrivais plus à connecter avec personne. Et j’ai compris et accepté. Je n’avais pas besoin de connecter avec tout le monde. C’est néanmoins ce que l’on s’impose en société. En fait, j'avais besoin de connecter uniquement avec des personnes qui tiennent des propos qui résonnent en moi.
Après mures réflexions, j’avais compris que je n’avais pas perdu mes habiletés sociales, j’avais plutôt trouvé qui j’étais vraiment. Je n’avais plus envie d’être dans le paraitre. De nature réservée, je constatais à quel point, malgré tout, j’étais un être social. J’avais besoin des autres, de leur sourire, de leur histoire, de leur présence.
Le confinement, me rappelle cette vie sur l’eau. On croit par moment que l’on perd certaines habiletés sociales. Pourtant, depuis mars dernier, je n’ai jamais vu autant de gens se sourire et se saluer dans la rue. Il est vrai que l’on est parfois mal à l’aise avec des gens que l’on revoit, mais on réalise rapidement ceux qui sont nos véritables amis, ceux qui ont une réelle importance à nos yeux.
Si par moment, on a davantage le goût de rester seule, c’est peut-être parce qu’on en a besoin. Tout simplement. Dans notre société, on se demande rarement si on en a vraiment envie. On le fait, parce que tout le monde le fait. Mais, maintenant, on ne fait plus rien! La pandémie crée une cassure. On a dorénavant le temps de se questionner sur ce que l’on désire, ce qui nous fait du bien.
Des passions qui émergent
Et voilà que dans ce vide provoqué par les contraintes de la pandémie, on reprend contact avec le plus grand luxe, celui du temps. Les déplacements sont souvent réduits au minimum et l’horaire de la fin de semaine est totalement libre. Ce qui sommeillait au fond de nous a enfin un peu de place pour émerger. Les passions se réveillent. Plusieurs se sont lancés dans la cuisine, dans le jardinage, l’élevage des poules, dans l’entrainement, l’apprentissage d’un instrument de musique, d’une autre langue. Étonnamment, bien que les restrictions nous pèsent, elles nous offrent également un terreau incroyable pour revenir à notre véritable essence.
L’importance de la famille et de la nature
Peu à peu, on s’éloigne de la superficialité. Rien ne sert d’être dans le paraitre, alors qu’on est tous confiné à la maison. Aussi bien tenter d’être heureux avec ce que l’on a, soit notre famille et la nature. Deux éléments qui traversent le temps. On constate plus que jamais qu’il s’agit en fait de l’essentiel... et que dans cet essentiel, il y a tout.
La famille est précieuse, celle qui vit sous le même toit que nous, mais également celle qui est présente au fil des années. Nos parents, nos frères et sœurs, mais aussi nos amis véritables. Car à travers ces longs mois de pandémie planétaire, on reconnait les liens sincères, ceux qui nous font du bien. On prend conscience des relations futiles, par rapport à celles essentielles.
Il en va de même avec la nature. En épurant l’agenda, le plein air a retrouvé ses lettres de noblesse. Cette nature qui est toujours là pour nous et que plusieurs avaient oubliée. On redécouvre sa beauté, mais aussi les bienfaits qu’elle nous apporte. On réalise qu’on a besoin, en fait, de peu, pour être bien, mais qu’on a besoin de cette immensité.
Évidemment, lorsqu’on retrouve notre essence, que l’on reconnait les gens qui sont précieux pour nous, que l’on sait ce que l’on veut, mais qu’on ne peut voir personne ni faire ce dont on a envie, des souffrances s’accentuent par moment. Il faut être patient et tenter de trouver notre bonheur dans notre environnement immédiat; en profiter, simplement, pendant que la roue a cessé de tourner ou qu’elle tourne au ralenti... et découvrir comment sortir de cette fameuse cage.