Dernièrement j’ai lu une entrevue très intéressante avec la prof de yoga américaine Jessamyn Stanley, qui a publié un livre intitulé Every Body Yoga. Elle parlait de sa démarche d’acceptation de son corps, qu’elle considère distincte du mouvement de body positivity qu’on voit beaucoup sur les réseaux sociaux en ce moment.
Ça m’a fait bien réfléchir et je suis sûre que ce sera le cas pour beaucoup d’autres femmes aussi.
Body acceptance vs body positivity
J’avais bien sûr toujours vu le mouvement #bodypositive comme étant… POSITIF. Et je crois encore que la représentation est primordiale : dans la nature, le corps humain existe en milliers de variations possibles. Pourtant, dans les médias et dans la sphère publique, on ne voit qu’un nombre très restreint d’exemples, ce qui pousse beaucoup trop de femmes à croire qu’il y a quelque chose qui cloche avec elles. Rien ne cloche! Ce sont les médias qui doivent changer et montrer toutes sortes d’exemples dans leur plus grande normalité… Ce qui finira par faire changer un peu l’opinion publique (disons que la grossophobie ne disparaitra probablement pas de sitôt), mais au moins la perception que les filles et les femmes ont d’elles-mêmes.
Sauf que j’ai été étonnée de constater que pour Jessamyn, le mouvement body positive n’était pas quelque chose de très porteur. C’est comme si elle voyait le fait de s’accepter comme une obligation, une corvée de plus dans sa liste de choses à faire.
Ce que la prof de yoga déplorait surtout, c’était l’espèce de pression qui venait avec le mouvement body positive, qui voudrait qu’on aime notre corps coûte que coûte et qu’on en soit 100% fière, en tout temps.
Pour elle, la démarche d’acception de son corps était donc plus douce et plus réaliste au quotidien.
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Qu’est-ce que ça veut dire, l’acceptation de son corps?
Pour Jessamyn Stanley, le body acceptance, ça veut dire que parfois, on peut se regarder dans le miroir et ne pas se sentir bien avec ce qu’on voit. Que c'est tout à fait correct et légitime. Qu’on a le droit, aussi, de ne pas être parfaitement fière de toutes nos caractéristiques physiques.
Mais attention, ça ne veut pas dire pour autant qu’on se déteste, qu’on se rabaisse, qu’on a honte, qu’on a mal à notre estime de soi ou qu’on voudrait prendre des moyens drastiques pour changer!
Au contraire, le body acceptance est vraiment une démarche de bienveillance, qui part justement de l’acceptation de ces sentiments parfois négatifs envers notre corps, de la conscience qu’il n’est pas nécessaire de les réprimer et de leur transformation vers une meilleure connaissance de soi.
Par exemple, l’auteure croit que oui, c’est correct de se lever un matin et de se sentir comme de la merde dans son corps, MAIS qu’il faut aller plus loin, se poser des questions et entreprendre en quelque sorte une thérapie avec soi-même. Par exemple : « D’où vient ce sentiment négatif? », « Comment je peux le confronter et passer au-travers? », « Comment je peux réellement m’aimer malgré ça? ».
Le moins beau côté du mouvement body positive
Jessamyn Stanley avoue qu’au début, elle s’était vraiment identifiée au mouvement #bodypositive, mais qu'elle a depuis complètement déchantée : « Depuis que le mouvement est devenu plus présent et dominant, le message a changé. Au départ, je le voyais comme une opportunité et une libération de constater que je suis OK comme je suis aujourd’hui, que tout à propos de moi est exactement ce qu’il devrait être. Mais maintenant, ce qui a été digéré ressemble plutôt à Les femmes hétérosexuelles et cisgenres devraient s’aimer comme elles sont. Pour moi, c’est différent de la véritable acceptation de son corps ».
« Je trouve l’idée trop réductrice : celle de cette quête de positivité qui veut que lorsqu’on a trouvé la lumière, tout le travail est fait et tout est réglé! Alors pour moi, le mouvement body positive n’est pas la solution. Mais je trouve qu’il y a toujours une grande nécessité pour tous les êtres humains de trouver la paix avec eux-mêmes, de s’accepter comme ils sont en ce moment ».
La marginalisation et l’intersectionnalité
Ne pas aimer son corps est loin d’être réservé aux filles et aux femmes tailles plus! C’est plutôt un trait généralisé, souvent profondément ancré en chaque femme depuis son plus jeune âge, au sein d’un système qui ne fait absolument aucune gagnante.
Par contre, le mouvement body acceptance prône l’importance de reconnaître qu’au-delà de ça, certains types de corps ont été marginalisés depuis longtemps dans notre société, et même considérés comme étant inacceptables non seulement pour montrer dans la sphère publique, mais simplement pour exister.
Jessamyn Stanley insiste donc sur l’importance du côté intersectionnel du mouvement : c’est-à-dire qu’il ne doit pas seulement inclure les femmes blanches qui correspondent encore à peu près aux standards, mais également les personnes de couleur, les personnes de la communauté LGBTQ+, les personnes avec un handicap, etc.
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Un autre message inspirant
Je trouvais que le discours de Jessamyn Stanley rejoignait un peu la démarche de @thebirdspapaya (qui s’appelle Sarah Nicole Landry) sur Instagram. J’aime beaucoup la suivre depuis quelques années (avec 1,6 millions autres personnes!), entre autres grâce à son honnêteté complète face à sa propre démarche d’acceptation de soi. C'est beaucoup la réalité du corps post-partum que l'influenceuse a partagé.
Oui, il faut remarquer qu’elle est exactement une femme blanche avec un visage qui correspond aux standards et qu’elle n’est pas considérée comme « plus size », mais plutôt comme « mid-size », c’est-à-dire que même si elle reçoit des commentaires négatifs tous les jours sur son corps, elle est parfaitement consciente qu’elle ne vivra jamais de réels préjudices comme ne pas trouver de vêtements à sa taille, se faire constamment insulter dans la rue ou avoir peur de ne pas avoir assez de place dans un siège.
Si ce n’est déjà fait, vous devriez la suivre, ne serait-ce que parce qu’on voit tellement peu de ce type de modèle!
Complètement elle-même sans s’excuser de l’être, sans aucune crainte de montrer même ce qu’elle aime moins de son corps, prête à défaire les stéréotypes et les préjugés un par un, encore et encore.
Elle a beaucoup varié de poids dans sa vie et son message est toujours le même : « Je ne me suis pas sentie mieux une fois que je suis devenue très mince… Et malgré tout le travail sur moi-même que j’ai accompli, j’ai encore de la misère au quotidien à m’accepter comme je suis. Mais ça fait partie du processus et c’est correct. L’important, c’est de continuer à essayer et de ne pas s’en remettre à ce que les autres pensent de soi ».
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