Être positif est devenu presque un diktat. Il faut voir la vie du bon côté à tout prix, nous disent plusieurs personnes. Mais quand on flirte avec le positivisme extrême, on risque de repousser les émotions négatives. Pourtant, celles-ci nous aident à cheminer et même à être en meilleure santé. Les émotions ne sont pas nos ennemies, elles nous en apprennent tellement sur nos limites, nos besoins, nos envies. On fait le point.
Afficher un sourire même quand on ne se sent pas si bien est un réflexe. Le même que lorsqu’on répond « ça va » alors qu’on n’a pas du tout le moral. Vit-on dans une ère de positivisme obligé? Peut-être un peu. Il n’y a qu’à jeter un œil sur tous les livres qui nous poussent à être positifs et à voir le meilleur côté des choses. « Sois positif et de belles choses tu attireras! »
Être positif, optimiste, heureux et bien dans sa peau est devenu plus qu’un art de vivre, mais presque une obligation. Mais cette voie ne serait pas toujours celle à préconiser. En effet, selon Susan David, professeur à Harvard et auteure du livre Emotionnal Agility, il faudrait apprendre à dire « non » à la positivité extrême et «oui» aux émotions négatives. Évidemment, elle n’oblige personne à broyer du noir pour être heureux, mais elle ne croit pas que de forcer la positivité soit bénéfique. Elle prétend qu’accepter les émotions négatives permettrait même d’avoir une meilleure humeur à long terme. Alors, oui, la positivié à outrance peut-être toxique. Pour nous-mêmes, mais aussi pour les autres à qui on invalide une détresse pourtant réelle.
Le côté sombre du positivisme
Prétendre que tout va toujours bien est un leurre. Une vie est parsemée d’embuches, petites ou grandes. Et c’est normal. Susan David estime que supprimer, rejeter, refuser ou taire nos émotions difficiles ou nos pensées négatives serait dommageable.
Voici les risques associés à cette tendance :
- Réduction de la capacité à vivre et à s’adapter dans le monde tel qu’il est (et non comme on voudrait qu’il soit) ;
- Diminution du niveau de bien-être personnel ;
- Augmentation des dépressions et de l’anxiété ;
- Difficulté à atteindre ses objectifs ;
- Négation des émotions négatives des autres ;
- Difficulté à demander de l'aide psychologique si une mauvaise santé mentale l'exige ;
- Influence négative sur toutes nos relations.
Vlada Karpovich/Pexels
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Comment bien vivre les émotions négatives?
Il n’y aurait donc rien à gagner à vouloir supprimer les émotions négatives de nos vies. Il faut donc apprendre à les vivre le plus sereinement possible. Susan David insiste sur ce point : avoir des pensées négatives ou vivre des émotions difficiles n’est pas néfaste, c’est de rester accrocher à elles qui l’est. Et lorsqu’on ne les vit pas, celles-ci restent quand même tout près et nous « hantent » d’une certaine façon.
Voici 3 étapes pour accepter de vivre nos émotions difficiles :
— Identifier spécifiquement l’émotion
Il ne faut pas se contenter de choisir entre deux extrêmes (comme heureux ou malheureux ou encore stressé ou calme). Tout n’est pas noir ou blanc! Il existe une palette d’émotions pour définir ce qu’on ressent. Stressé peut se décliner en terrassé, accablé, nerveux, soucieux, inquiet, dans le doute, incertain, etc. La précision permet de clarifier le ressenti et de mieux identifier ses causes. Aussi, tu seras davantage en mesure de t'activer pour apporter des changements et trouver des solutions.
— Accueillir l’émotion avec compassion
Bye bye la culpabilité, la honte, le jugement ou la gêne! Vis ce que tu as à vivre. Et ne t'empresse pas à repousser l’émotion qui t'habite. Elle t'est utile. Apprends à l’accueillir avec compassion. L’auteure estime que la compassion est un espace intérieur sécuritaire où tu t'autorises à prendre des risques et à t'aimer, peu importe ce qui survient.
— Écouter ce que raconte cette émotion
En un sens, cette émotion arrive avec un bagage, une histoire. Mais pour l’écouter, tu dois d’abord mettre de la distance entre toi et l’émotion. Il est aussi important de faire la distinction : tu n'es pas l’émotion. Elle ne te définit pas. Au lieu de dire « je suis stressée », dis plutôt « je remarque que je ressens du stress ». La différence est subtile, mais nécessaire pour ne pas que tu te sentes définie par une émotions qui te visite. Ensuite, tu parviendras à écouter ce que raconte ton émotion. À force de pratiquer, tu remarqueras mieux ce qu’elle met en relief dans ta vie. Tes observations te permettront d’avancer, de faire des choix et de poser des gestes.
Enfin, n’oublie pas que les émotions négatives ou positives ne sont pas un état permanent. Elles fluctuent, changent, s’intensifient, se calment, etc. Bref, elles sont en mouvement. Et ça tombe bien : tu détiens le potentiel en toi pour les vivre et les accueillr.
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