Pour la plupart des gens, le stress, l'hypersensibilité ou la dépression sont des troubles uniquement mentaux. Pour Gabriel Perlemuter, hépato-gastro-entérologue, la réponse est plus complexe. Pour ce spécialiste, il faudrait en effet regarder également ce qui se passe plus bas... dans nos intestins et plus particulièrement au niveau de nos bactéries.
De flore à microbiote
Autrefois appelée flore intestinale, on parle désormais de microbiote intestinal. Celui-ci comprend tout un tas de micro-organismes comme les bactéries, les virus, les champignons (levures) ou encore les archées.
Au total on estime qu'il y a dans notre microbiote intestinal pas moins de 100 000 milliards de bactéries et que celles-ci joueraient un rôle majeur en ce qui concerne notre humeur et certaines maladies qu'on pensait être uniquement mentales. Nos bactéries ont de nombreuses fonctions dont l'immunité. Celles du microbiote intestinal participent par exemple à la fonction barrière de l'intestin, ce qui permet d'empêcher la colonisation par des espèces pathogènes.
Nos intestins et notre cerveau: un dialogue permanent
La recherche médicale ne cesse d'évoluer et parmi les chantiers les plus récents et les plus prometteurs, on trouve celui du microbiote intestinal. Longtemps ignoré et sous-étudié, ce domaine est depuis quelques années le point de convergence de nombreuses recherches et études internationales.
Ce qui explique ce récent intérêt de la communauté scientifique pour nos intestins, c'est qu'un lien est désormais établi entre notre cerveau et ce qui se passe dans notre ventre. Le microbiote intestinal reste cependant encore une terre inconnue qui recèle beaucoup de secrets. «Aujourd'hui, les preuves scientifiques des interactions entre le microbiote et le cerveau ne laissent plus de part au doute», indique Gabriel Perlemuter, auteur du fascinant livre Stress, hypersensibilité, dépression...et si la solution venait de nos bactéries.
Édito
Pour Bertrand Routy, professeur adjoint en hémato-oncologie à l'Université de Montréal, nous sommes encore au commencement... «La révolution du microbiote en médecine ne fait que débuter. Elle pourrait modifier le concept des spécialités médicales orientées autour d'un organe pour laisser place à une vision plus globale, un grand tout nourri par la composition du microbiote et les caractéristiques génétiques de chaque personne».
Dans le livre très accessible de Gabriel Perlemuter, on apprend en effet que les dernières études vont toutes dans le même sens, celui d'une connexion entre nos différents organes et systèmes, notamment entre notre tête et notre ventre. «Il est désormais évident que les fonctions de nos bactéries intestinales débordent de notre système digestif pour agir loin de lui: dans notre tête et sur notre système nerveux», explique l'auteur.
L'exemple de la faim
Concrètement, il existe un dialogue entre nos bactéries et notre cerveau qui est établi notamment grâce au nerf vague. Gabriel Perlemuter précise cependant que les détails exacts de cette communication restent encore flous. «On ne connaît pas encore les mécanismes exacts par lesquels les bactéries agissent sur le nerf vague pour moduler les neurones du cerveau». Toujours est-il que le dialogue existe et qu'on en peut en observer les effets. C'est le cas de la sensation de faim.
Selon ce que l'on mange, une nourriture adaptée à notre microbiote intestinal ou au contraire de la malbouffe, nos bactéries n'enverront pas le même signal à notre cerveau. «Avons-nous faim ou non? Quand le microbiote est perturbé par la malbouffe par exemple ou une mauvaise hygiène de vie, les bactéries ne sont plus capables de bien faire passer le message au cerveau qui ne sait plus ce qui se passe au niveau du ventre. Résultat: on va avoir faim et continuer de manger». Outre la faim, les questions qui sont le plus étudiées sont celles liées aux maladies.
Maladies mentales... ou intestinales?
Les dernières études concernant le microbiote intestinal indiquent que la perturbation de celui-ci est associée à de nombreux troubles et maladies: diabète, maladies inflammatoires de l'intestin (maladie de Crohn), hypersensibilité, maladie d'Alzheimer ou encore la dépression.
Pour ce dernier trouble, la malbouffe est très clairement pointée du doigt. Si on mange n'importe quoi, on influence négativement nos bactéries intestinales, ce qui a des répercussions sur notre moral notamment. On mange mal, donc on se sent mal et on devient déprimé. «Nos bactéries intestinales seraient loin de se limiter à un rôle de la digestion: elles induiraient des modifications encore plus importantes dans notre organisme, y compris dans le cerveau, au niveau des neurones, pour participer à nos états d'âme», indique le professeur Perlemuter.
Un autre domaine de recherche très intéressant concerne les dépendances. Il ressort que nos bactéries intestinales peuvent moduler nos neurotransmetteurs et influencer les circuits hormonaux, dont le circuit de la récompense, celui qui entre en jeu dans le processus de la dépendance. Ainsi, la présence ou l'absence de certaines bactéries pourraient entrainer un besoin de sur stimuler nos circuits de récompense et donc nos addictions.
Il peut y avoir un rapport également entre l'autisme et les bactéries. La nutrition est un domaine très étudié et qui n'en est qu'à ses débuts. «En pratique médicale, j'ai l'habitude d'être concret. On ne sait pas guérir de l'autisme, mais on peut essayer d'atténuer certains de ses symptômes. Si un apport de probiotiques et une modification du régime alimentaire peuvent diminuer les douleurs au ventre et modifier ne serait-ce qu'un peu, certains troubles du comportement, pourquoi ne pas essayer», écrit le spécialiste.
Pendant longtemps, la science a séparé l'individu de ses bactéries. On se rend compte depuis quelques années que ces mêmes bactéries jouent un rôle de premier plan à de multiples niveaux, notamment celui des maladies.
La santé, l'absence de maladies, passe notamment par une alimentation qui tient compte de notre microbiote intestinal. «Quand on mange, on mange aussi pour nos bactéries. Nous devons faire attention à elles, faire attention à toutes les bactéries pour qu'elles puissent à leur tour faire attention à nous», conclut l'auteur du livre Stress, hypersensibilité, dépression...et si la solution venait de nos bactéries.
Allez dans le sens de la santé, une bouchée à la fois...
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