Dans le métro, au resto, en traversant la rue, il est maintenant commun de voir des gens fixer leur téléphone. Bien sûr, ce minuscule appareil contient tout un univers… mais sommes-nous conscients que les écrans sont une drogue? Et que celle-ci est bien plus dommageable qu’on peut l’imaginer?
Des écrans qui rendent dépendants
Joël Monzée, docteur en neuroscience, propose un parallèle entre l’alcool et les écrans. Ce n’est pas parce qu’on a hâte de prendre un verre de vin le vendredi soir que l’on est alcoolique… mais une certaine forme de dépendance s’immisce tranquillement. Avec les écrans, c’est un peu la même chose. Nous n’avons pas tous les mêmes prédispositions, les cas réels de cyberdépendances sont donc plutôt rares. Malgré tout, nous sommes de plus en plus dépendants des écrans de toutes sortes.
À cet effet, docteur Monzée explique que plusieurs jeux vidéo, émissions pour enfants, médias sociaux sont développés spécifiquement pour créer une dépendance, entre autres en utilisant un système de récompense. Grâce à ce système, le cerveau sécrète de la dopamine, l’hormone du plaisir, la même qui est sécrétée lorsqu’on relaxe en prenant un verre alcoolisé. Dans le monde réel, il s’avère plus difficile d’atteindre cet état cérébral. On replonge alors rapidement dans le monde virtuel. La dépendance s’accentue graduellement, surtout si le plaisir est plus grand devant l’écran que dans la vraie vie.
Une diminution de l’empathie et des relations éthiques
S’ensuit toutefois un autre effet inquiétant. Celui-ci est particulièrement remarqué chez les consommateurs de jeux vidéo axés sur la violence. Plus la recherche de plaisir augmente, plus elle perturbe le cerveau. Progressivement, ce dernier bloque l’action de deux autres neurotransmetteurs :
- la sérotonine qui règle notre humeur et contribue à l’empathie;
- la noradrénaline qui favorise les comportements éthiques et les relations humaines.
Bien sûr, ce ne sont pas tous les types de jeux ni toutes les émissions consommés sur petits et grands écrans qui ont cet impact. Néanmoins, plusieurs d’entre eux contribuent à diminuer l’empathie et nuisent aux relations éthiques. Deux éléments pourtant essentiels pour vivre en société.
Une atrophie du cerveau qui accentue les risques de maladies mentales
Dans notre quotidien, nous n’avons pas besoin d’études et de recherches pour réaliser que, selon notre consommation de télévision ou de vidéo sur différentes plateformes, les dommages sont plus ou moins grands que ce soit au niveau de la qualité de notre sommeil, de notre anxiété, de notre capacité de concentration et même de notre état de santé lié à notre sédentarité. Mais au-delà de nos observations, de plus en plus d’experts tendent à démontrer que les écrans ont un impact concret sur le cerveau.
Des chercheurs de l’Université de Montréal, dans une vaste étude liée à un type de jeux vidéo en particulier, ont remarqué que le cerveau des individus qui s’adonnent aux jeux de tir s’atrophie. L’hippocampe, une partie essentielle du cerveau, s’avère grandement affecté alors que la matière grise diminue considérablement sous l’impact des heures passées devant un écran.
À cet effet, les chercheurs rappellent qu’il existe un lien direct entre l’affaiblissement de l’hippocampe et le risque de souffrir d’une maladie mentale comme la dépression, la schizophrénie, le trouble de stress post-traumatique ou la maladie d’Alzheimer.
Avec les taux en progression des maladies mentales, sans sauter trop vite aux conclusions, peut-être faut-il se questionner par rapport à notre utilisation de divers jeux proposés.
Une perte de connexion à notre monde
Alors que les écrans sont une porte ouverte sur le monde, ironiquement, ils nous coupent de notre monde.
D’ailleurs, des dirigeants de la Ligue nationale de hockey ont dû bannir le jeu Fortnite lors de leurs déplacements. En plus de voir une baisse de rendement chez les joueurs, ils ont remarqué que certains d’entre eux s’isolaient et allaient même jusqu’à s’absenter des soupers d’équipe pour pouvoir s’adonner à ce jeu.
Peut-être s’agit-il de circonstances extrêmes, mais le constat demeure le même, à plus petite échelle, dans notre quotidien. Chaque jour, nous sommes témoins d’une situation qui s’y apparente : une discussion n’a pas lieu parce qu’un écran s’est interposé; on voit à peine la personne qui s’assoit à nos côtés, car on est captivé par une vidéo, on oublie de demander à son conjoint et ses enfants comment s’est déroulée leur journée parce qu’il y a tant à voir sur notre tablette ou notre téléphone. Et c’est sans parler de la perte de temps, alors que notre téléphone intelligent devrait nous en faire gagner!
L’instantanéité qui tue l’instant présent
Les écrans nous amènent ailleurs et nous incitent à vivre par procuration. On doit partager rapidement ce que l’on voit avant même de l’avoir soi-même assimilé. Est-ce que l'on vit à l’envers? On oublie de profiter de l’instant présent? Ce n’est pas si grave! On pourra toujours s’y attarder par la suite en regardant la vidéo et les photos qu’on en a faites.
Mais le moment sera disparu à jamais.
Il semble se produire la même chose dans l’univers du voyage. Les gens accourent pour obtenir La photo, celle que tout le monde prend, mais le lieu perd de son authenticité. La magie se voit rarement sur une photo, elle se vit. Il faut prendre le temps et délaisser les écrans. Utiliser nos yeux, nos mains et surtout notre cœur.
Le virtuel qui envahit notre réalité
À l’ère des médias sociaux, on sait maintenant qui voyage à quel endroit, qui est avec qui, où et comment. Grâce aux moteurs de recherche, on peut trouver une réponse à tout. Cependant, savons-nous comment se porte véritablement notre voisin de bureau, notre ami? Au-delà des images partagées et consultées, comment vont ceux que nous aimons?
Le lieu peut être sensationnel, le restaurant le meilleur au monde, mais si on se sent seul… est-ce que tout cela a un sens? On signifie aux autres : je fais des choses extraordinaires! Mais, peut-être voudrions-nous plutôt discuter avec des gens extraordinaires, c'est-à-dire notre famille et nos amis?
Lors de soirées entre amis, certaines personnes passent plus de temps à se photographier et à partager avec le monde virtuel qu’à s’intéresser à la vie de ceux qui les entourent. Vous savez, la vie ordinaire toujours sur le même fond, sans filtre ni couleur; la vraie, celle dans laquelle les éléments banals sont extraordinaires, mais aussi parfois difficiles à vivre, celle qui est chaotique, mais aussi très belle lorsqu’on se lève la tête et qu’on prend le temps de regarder ce qui nous entoure…
Évidemment, les écrans sont là pour rester, ils sont un outil incroyable. Toutefois, il faut apprendre à se contrôler, profiter du moment présent et se reconnecter avec la réalité. Notre cerveau et notre cœur sont les meilleurs outils pour nous faire vivre les plus grandes émotions, les plus beaux moments. L’humain est une magnifique machine, bien plus que n’importe quel écran!
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