Depuis quelques années, on en entend beaucoup parler, alors vous vous posez peut-être des questions sur le gluten? Selon le magazine Forbes, aux États-Unis, le nombre de gens qui suivent une diète sans gluten a triplé depuis 10 ans[1]. Ici au Canada, plus de 2,5 millions de personnes suivraient une telle diète pour des raisons médicales[2]. C’est énorme! Je suis moi-même une telle diète depuis plus de 7 mois, alors j’avais envie de m’attarder au phénomène.
Qu’est-ce que le gluten?
C’est un type de protéines qu’on trouve dans le blé, mais aussi dans d’autres céréales comme l’épeautre, le seigle, le kamut et l’orge. Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, l’avoine ne contient naturellement pas de gluten, mais elle est particulièrement susceptible d’en garder des traces à cause d’une contamination croisée, et ce autant dans le champ que dans les chaînes de transformation. C’est pourquoi on trouve sur le marché de l’avoine certifiée sans gluten.
La majorité des gens tolèrent bien le gluten, mais pour bien d’autres personnes, cette substance ne passe pas et peut provoquer toutes sortes d'effets nuisibles, autant digestifs que systémiques. Une difficulté à tolérer le gluten peut survenir à tout âge et se produire soit petit à petit, ou au contraire, assez soudainement.
Qu’est-ce que la maladie cœliaque?
C’est une condition auto-immunitaire sérieuse et chronique, qui se produit parce que le gluten pousse le corps à déclencher une réaction d'attaque contre l’intestin. La paroi de ce dernier devient endommagée et perméable, empêchant l’absorption des nutriments et pouvant causer des problèmes graves à long terme.
Beaucoup d’autres conditions sont reliées à la maladie coeliaque, à commencer par l’intolérance au lactose, l’anémie, les problèmes de thyroïde, la dépression, le diabète, l’infertilité, les maladies coronariennes et l’ostéoporose...
Il y a eu longtemps plusieurs mythes reliés à la maladie coeliaque, par exemple que seuls les enfants pouvaient être diagnostiqués (faux, ce diagnostic peut survenir à tout âge, et arrive même souvent chez les personnes âgées) ou encore que seules les personnes minces pouvaient en être atteintes (faux, maintenant 40 % des personnes qui sont diagnostiquées présentent un surplus de poids).
La réalité, c’est que même si seulement 1% de la population générale possède un diagnostic de maladie coeliaque, les experts estiment que jusqu’à 90% des personnes atteintes ne sont pas diagnostiquées et ignorent même qu’elles ont un problème aussi sérieux.
C’est entre autres parce que les symptômes de la maladie coeliaque peuvent être très variables et très vagues. On parle de présentation « classique » (les symptômes peuvent être par exemple une diarrhée chronique avec des selles malodorantes et de l'anémie -qui peut d'ailleurs facilement passer pour de la fatigue persistante), « non-classique » (symptômes gastro-intestinaux mineurs, migraines, dépression et anxiété, éruptions cutanées, etc.) et même « silencieuse » (patients asymptomatiques ou presque).
Est-ce que la maladie coeliaque est héréditaire?
Oui... Et non. Si quelqu’un de votre famille immédiate est diagnostiqué, ça augmente de beaucoup vos risques de développer les symptômes aussi un jour (mais ça ne veut pas nécessairement dire que ce sera le cas). Même une personne dans votre famille élargie, comme une cousine diagnostiquée, augmente aussi les risques.
Par contre, n’importe qui peut développer la maladie cœliaque, même sans facteur héréditaire. Le fait de n’avoir personne avec ce diagnostic dans votre famille ne vous « protège » donc pas de cette maladie chronique.
Comment peut-on diagnostiquer la maladie cœliaque?
Pour une personne qui mange du gluten, la maladie peut être diagnostiquée à l’aide d’une simple prise de sang. Ce test sanguin identifiera des anticorps précis qui indiquent une réaction auto-immunitaire au gluten.
Il existe également un test génétique, mais qui ne permet pas de confirmer hors de tout doute la maladie. La maladie cœliaque est en effet liée à deux gènes spécifiques (un qui est présent chez 95 % des patients atteints et l’autre chez 5 %). Si une personne ne possède pas ces gènes, il n’y a aucune risque qu’elle soit céliaque. Si elle possède un gène (deux c’est peu probable), ça augmente ses risques sans toutefois prouver la présence de la maladie. Ce test est donc plutôt utile pour exclure la maladie, par exemple chez les proches d’une personne diagnostiquée.
Si vous avez coupé le gluten avant de passer les tests, il faudra traverser un « défi de gluten », c’est-à-dire en consommer deux portions par jour pendant 6 à 8 semaines avant de faire une prise de sang. Ceci devrait être fait sous supervision médicale.
Est-ce que ce sont seulement les personnes céliaques qui devraient arrêter de manger du gluten?
Vraiment pas! Il s’agit encore d’une idée préconçue qui malheureusement, cause son lot de souffrance inutile. Une manière plus constructive d’aborder la question, au lieu de discréditer les personnes qui affirment avoir un problème avec le gluten même sans avoir un diagnostic de maladie coéliaque, serait de leur proposer de se faire tester tout simplement, au lieu de leur répéter qu’elles n’ont pas raison de se sentir ainsi.
En plus de la maladie coeliaque, jusqu’à 13 % des individus auraient une « sensibilité au gluten », même si cette dernière n’est pas auto-immunitaire (elle peut toutefois être inflammatoire; l'inflamation chronique est un signe certain que quelque chose ne fonctionne pas tout à fait dans le corps). Il existe également plusieurs autres conditions médicales pour qui un régime sans gluten peut être bénéfique : les gens qui ont une sensibilité aux FODMAPs (de l'anglais « Fermentable Oligo- Di- Mono-saccharides And Polyols », pour désigner des aliments qui chez certaines personnes fermentent dans l'intestion et ont tendance à causer des gaz et ballonements), les gens qui ont une intolérance ou une allergie au blé, les gens qui souffrent du syndrome de l’intestin irritable, de la colite ulcéreuse, de la maladie de Crohn ainsi que plusieurs autres conditions chroniques inflammatoires et auto-immunitaires.
Est-ce que « réduire le gluten » est suffisant?
Pour les personnes céliaques, c’est clair : aucune dose n’est sécuritaire. Réduire ne suffit donc pas.
Chez certaines personnes, manger moins de gluten (disons seulement de petites portions à l’occasion) peut diminuer leurs symptômes. Le corps humain est complexe et parfois, il peut y avoir des contextes durant lesquels le gluten est mieux toléré que d’autres. Le mieux reste de faire des tests et de prendre des notes pour établir des patterns.
Une chose à ne pas négliger et dont je n’entends pourtant presque jamais parler, c’est la suivante : on semble oublier à quel point TOUTE notre alimentation nord-américaine est basée sur le gluten. Manger normalement, pour beaucoup de monde, ça signifie manger des rôties le matin, un sandwich le midi et des pâtes le soir. Presque juste du gluten, #alldayeveryday! Dans ce contexte, réduire ne peut certainement pas faire de tort, intolérance ou pas... Une alimentation très riche en farines raffinées et (forcément) pauvre en légumes, disons que ce n’est pas le meilleur moyen de maximiser ses nutriments.
Je pense, par contre, que pour la majorité des gens avec une sensibilité ou intolérance, réduire n’est probablement pas assez. C’est vraiment difficile de prendre la décision de couper le gluten complètement, mais pour aider notre corps à se rééquilibrer, c’est probablement la meilleure solution.
Dans mon cas, couper le gluten n’était même pas encore suffisant et éliminer la plupart des produits céréaliers semblait plutôt être la solution pour que mes symptômes se résorbent et que je me sente presque 100 % mieux, autant physiquement que mentalement.
Est-ce que manger sans gluten est une tendance?
Depuis le jour-même où j’ai arrêté de manger du gluten, je me demande honnêtement pourquoi les gens voient ceci comme une tendance ou une espèce de mode qu'on peut tourner au ridicule?
Oui, c’est vrai que les produits sans gluten sont en forte croissance (tout comme par exemple les produits bio ou véganes), mais je ne comprends pas pourquoi ce serait une mauvaise chose -que tout le monde puisse désormais trouver ce qui lui convient en alimentation.
Manger sans gluten, c’est dur guys. Tout est beaucoup plus compliqué. Chaque jour. Chaque repas. Je me passerais à 100 % de devoir souvent faire deux soupers, de voir les yeux des serveurs rouler au restaurant ou d’arriver quelque part et de réaliser que… je ne peux absolument RIEN manger, mais comme je ne veux pas non plus attirer l’attention là-dessus, je suis d’autant plus mal à l’aise. Je m’ennuie tellement de manger normalement! Des fois j’ai le goût de pleurer en pensant que peut-être, plus jamais je ne dégusterai un vrai plat de pâtes fraîches, un pain qui vient juste de sortir du four, une pizza au four à bois avec une croûte craquante, un gâteau ou un croissant traditionnels…
Je ne veux pas me plaindre ici ou nier que malgré tout, je suis quand même très chanceuse et privilégiée de trouver ce dont j’ai besoin. Mais je suis à peu près sûre que personne n’aurait envie de se soumettre à ça juste pour le fun, sans être obligé! Il existe des caprices beaucoup plus simples à gérer au quotidien.
Est-ce que les produits sans gluten sont plus « santé »?
Non! C’est pourtant une perception répandue : des 10 millions de Canadiens qui recherchent des produits sans gluten, plus de 7 millions le feraient parce qu’ils « perçoivent les produits sans gluten comme un choix santé »[3].
Pourtant, si vous n’avez aucune intolérance au gluten, ces produits ne seront ni plus ni moins santé que ceux qui contiennent du blé, par exemple. Et on s’entend qu’une pâtisserie industrielle sans gluten ne sera jamais santé (même si c’est bien correct d’en manger pour se faire plaisir de temps en temps).
C’est un peu comme le bio : de la malbouffe bio, ça existe! Mais on peut quand même vouloir en acheter pour différentes raisons, autres que la santé.
Comment éviter le gluten?
En premier lieu, il faut bien sûr éliminer le blé et toutes les autres céréales qui contiennent du gluten. Ce qui est déjà beaucoup plus facile à dire qu’à faire!
Mais si seulement c’était juste ça. Il y a du gluten dans tellement de produits auxquels on ne s’attend pas : à commencer par la plupart des bières ou des sauces soya. Je vérifie maintenant systématiquement tous les produits transformés : les frites congelées, par exemple, peuvent contenir du gluten, tout comme les vinaigrettes, les sauces, les épices…
Est-ce qu’une personne céliaque peut continuer à faire de la pâtisserie ou à manipuler des produits qui contiennent du gluten?
Je me suis informée, car je vis avec trois personnes qui mangent du gluten d’abord, mais aussi parce que j’adore tout simplement faire du pain et de la pâtisserie : c’est un des grands plaisirs de ma vie depuis toujours.
Je n’ai pas encore de diagnostic de maladie céliaque confirmé, mais je sais que la plupart des personnes qui le sont instaurent deux systèmes parallèles dans la maison : deux grille-pains, deux planches à découper, etc.
Ce que j’ai trouvé comme information, c’est que même en étant céliaque, il est possible de continuer par exemple à faire des rôties ou des sandwichs pour les autres membres de la famille, et même de faire du pain et des pâtisseries. Alors pour l’instant je continue d’en faire, je me lave les mains souvent -et je me retiens d'y goûter!
Par contre, il n’est pas conseillé à une personne céliaque de travailler dans une boulangerie ou une pâtisserie même sans manger de gluten, puisque la poussière de farine ambiante finit par être ingérée et pourrait être suffisante pour déclencher une crise.
Note : La but de ce texte n’est vraiment pas de remplacer l’avis d’un médecin, ni vous pousser à couper le gluten à votre gré, mais simplement de vous procurer un peu d’information et de susciter la réflexion. Je vous recommande de consulter un professionnel de la santé si vous observez une intolérance au gluten ou si vous avez des interrogations.