Les troubles alimentaires chez l'enfant se caractérisent par un trouble en rapport à l'alimentation, et atteint de plus en plus de jeunes en bas âge. Cette psychopathologie se présente sous des formes diverses et peut apparaitre à tout âge, mais touche principalement les adolescents, notamment les filles.
Les résultats des études portent à croire que l'anorexie augmente chez les adolescents depuis les 50 dernières années et que son âge d'apparition diminue. En effet, 25,7 cas d'anorexie sur 100 000 filles de 10 à 14 ans ainsi que 3,7 cas sur 100 000 chez les garçons du même âge auraient été relevés. Les enfants et les adolescents sont donc sujets à souffrir des mêmes troubles alimentaires que les adultes, soit :
- L'anorexie : trouble psychopathologique qui consiste à lutter contre la faim et touche de 1 à 2 % des filles au Québec
- La boulimie : trouble se manifestant par l'ingestion excessive d'aliments, de façon répétitive et durable
- L'hyperphagie : épisodes d'orgies alimentaires, sans pratique compensatoire pour maigrir.
Des signes inquiétants
La courbe de croissance et de poids
Selon le Dr David S. Rosen, expert américain des troubles alimentaires, un enfant qui ne suit pas les paramètres de croissance établis devrait attirer l'attention de ses parents et du système de santé, nécessitant une évaluation plus poussée. Une chute de la courbe de croissance et/ou de la courbe de poids sont des situations qui devraient interpeller le médecin de famille de votre enfant. Si vous n'avez pas de médecin de famille, vous pouvez consulter un médecin en clinique si vous avez des inquiétudes à ce sujet.
Le poids en tête
En discutant avec les enfants au sujet de leur nutrition et de leurs habitudes alimentaires, il est bon de noter lorsque ces derniers évoquent le sujet des régimes et/ou expriment des préoccupations au sujet de leur poids. Si ces inquiétudes reviennent de manière récurrente, il est bon de consulter un professionnel, qui évaluera si elles risquent de se traduire en comportements potentiellement malsains.
Même chose pour l'activité physique. Les enfants et les adolescents qui pratiquent une activité physique de manière compulsive sont à risque de développer, si la pratique devient trop intensive et/ou obsessionnelle, un trouble alimentaire (environ le tiers des garçons de 13 et 16 ans souhaiterait avoir une silhouette plus imposante).
Certains enfants sont plus vulnérables que d'autres. Parmi les plus jeunes, les enfants présentant des symptômes d'anxiété sont plus susceptibles de développer des troubles alimentaires.
Comment dépister les TCA chez votre enfant
Selon la nutritionniste Guylaine Guèvremont, fondatrice et directrice de la Clinique Muula et auteure du livre Manger, un jeu d'enfant, plus tôt on intervient auprès d'un jeune à risque, meilleures sont les chances d'enrayer le trouble alimentaire chez notre enfant. De manière générale, les parents devraient rester vigilants et attentifs aux manifestations suivantes :
- Le parent voit son enfant maigrir. Ce dernier peut trouver des excuses pour ne pas manger (j'ai déjà mangé chez une amie ou à l'école, je n'ai pas faim).
- L'enfant parle de son poids à répétition, se trouve gros(se), n'aime pas son apparence en général.
- L'enfant manifeste une estime de soi qui s'effrite, se dénigre de plus en plus.
- L'enfant s'engage dans un premier régime (35 % des fillettes de 9 ans ont déjà tenté de maigrir).
- La mère souffre elle-même d'un trouble alimentaire et/ou est constamment au régime (aucun facteur génétique n'est prouvé, mais le risque de développer un tel trouble peut être accru).
De manière plus spécifique, le DSM-IV (Diagnostic and statistical manual of mental disorders) a établi les critères diagnostiques suivants, qui peuvent être observés tant chez les enfants que chez les adolescents et les adultes.
Anorexie
- Refus de maintenir un poids santé pour sa taille et son âge
- Peur intense de prendre du poids, même si la personne a un poids insuffisant
- Perception perturbée du poids et de la forme de son corps; importance disproportionnée donnée au corps dans sa perception de soi
Boulimie
- Épisodes d'orgie alimentaire récurrents, caractérisés par le fait de manger une quantité de nourriture beaucoup plus grande que ce qu'une personne de son âge et de sa taille mangerait dans les mêmes circonstances et pendant une même période de temps; un sentiment de perte de contrôle pendant cet épisode, une impression que l'enfant ne peut s'arrêter de manger ou ne peut contrôler ce qu'elle mange ni la quantité
- Comportements compensatoires récurrents pour éviter de prendre du poids : se faire vomir, consommer des laxatifs ou d'autres médicaments, jeûner ou faire de l'exercice
- Les orgies alimentaires et les gestes compensatoires ont lieu en moyenne deux fois par semaine minimum pendant trois mois
Hyperphagie
- N'exerce aucun contrôle sur sa consommation de nourriture
- Se sent en perte de contrôle pendant l'orgie alimentaire
- Mange une quantité disproportionnée de nourriture en une seule fois
- Mange beaucoup plus vite que pendant un repas normal
- Mange jusqu'à ressentir l'inconfort physique et des nausées à cause de la quantité de nourriture consommée
- Mange lorsque déprimé ou las
- Mange une grande quantité de nourriture même sans avoir faim
- Mange souvent seul
- Vit des sentiments de dégoût, de culpabilité et de déprime après une orgie alimentaire
Sources (informations et statistiques)
Guèvremont, Guylaine et Marie-Claude Lortie, Manger, un jeu d'enfant, Montréal, Éditions La Presse, 2008.
LEDOUX, Marielle, Lyne MONGEAU et Michèle RIVARD (2002). « Poids et image corporelle » dans Enquête sociale et de santé auprès des enfants et des adolescents québécois, 1999, Québec, Institut de la statistique du Québec, chapitre 14, p. 311 à 344.
Ressources professionnelles
Institut universitaire en santé mentale Douglas
9875, boulevard LaSalle, Montréal, (514) 761-6131.
Clinique MUula : Une équipe formée de nutritionnistes, de psychologues et de psychoéducatrices spécialisées dans les troubles alimentaires offre des services de consultation et d'accompagnement pour adultes et enfants. (514) 490-1001.
Catherine Morency, rédactrice Canal Vie