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Les nano et microplastiques retiennent de plus en plus l’attention de la communauté scientifique, et pour cause : ils s’invitent partout, des nuages aux sols jusqu’à nos assiettes. Une étude célèbre affirme même que nous en ingérons environ cinq grammes par semaine, soit l’équivalent d’une carte de crédit! Quoique cette idée invite à réfléchir, il existe heureusement des moyens concrets de limiter notre ingestion de plastique.
Avant de plonger dans le sujet, penchons-nous sur ce que sont vraiment les microplastiques et comment ils finissent dans nos assiettes.
Les nano et microplastiques sont de minuscules fragments de plastique, plus petits qu’un grain de sable ou même qu’un virus.
Ces infimes polymères industriels proviennent de la dégradation d’objets en plastique plus grands, car une particularité du plastique est qu’il ne se décompose pas; il se brise seulement en plus petits morceaux. Par la suite, ces particules s’accumulent dans l’environnement (eau, air, etc.) ainsi que dans les organismes vivants (les animaux et les humains).
Les microplastiques ont divers noms et origines, par exemple :
En dehors de l'alimentation, plusieurs objets et matériaux libèrent aussi des fragments de plastique, comme les pneus ainsi que les textiles synthétiques (polyester, nylon, etc.).
Comme le plastique est produit depuis des décennies, sa présence dans l’environnement ne fait qu’augmenter. Aujourd’hui, les scientifiques découvrent que des particules de plastique se faufilent un peu partout dans notre corps, entre autres dans le cerveau, le sang, le lait maternel, les poumons et le placenta.
Les effets des microplastiques sur le corps humain restent encore largement inconnus, mais les premières études sur les animaux suggèrent des risques pour la fertilité ou le système nerveux, entre autres.
Quant aux substances chimiques que le plastique libère, comme les phtalates et le bisphénol A, leurs impacts sont déjà mieux documentés (plus de détails là-dessus ci-bas).
Quand on prend conscience de la présence du plastique dans nos plats, il est facile de se sentir dépassé(e). Toutefois, il est important de ne pas paniquer; après tout, personne sur cette planète ne peut échapper aux microplastiques à 100%.
La clé est de contrôler ce que l’on peut selon les ressources auxquelles nous avons accès. La bonne nouvelle, c’est qu’il est possible de réduire notre dose quotidienne de microplastiques en modifiant quelques habitudes alimentaires.
Voici donc huit gestes pratiques, simples et efficaces pour manger (et boire) moins de plastique, avec des alternatives accessibles pour adapter ces changements à votre rythme. Découvrez quelles actions poser pour protéger votre santé et celle de la planète, un repas à la fois.
La chaleur augmente la dégradation du plastique. En d’autres mots, le plastique se doit d'être gardé loin des hautes températures afin de minimiser la migration de microplastiques d’un contenant vers son contenu.
Si vous utilisez des plats réutilisables en plastique, ne les mettez pas au micro-ondes, peu importe ce que l’emballage clame. Une étude de 2023 de l’Université du Nebraska a démontré qu’un bol de plastique chauffé trois minutes au micro-ondes peut libérer, dans son contenu, des microplastiques dans les millions… et des nanoplastiques dans les milliards.
Solution : Transférez votre repas dans une assiette ou un bol (en céramique, en verre, etc.) avant de le réchauffer au micro-ondes.
Pareillement, si la nourriture est encore chaude, il faut attendre qu’elle refroidisse avant de la ranger dans des contenants de plastique.
Solution : Si on prépare une grosse recette, comme une batch de sauce à spaghetti, de soupe ou autre, on ne la transfère pas dans des plats en plastique tant qu’elle n’a pas refroidi.
Finalement, l’eau chaude du lave-vaisselle contribue à la dégradation du plastique.
Solution : Lavez la vaisselle en plastique à la main, avec de l’eau tiède.
Ou, pour éviter de se casser la tête, on peut simplement opter pour l’astuce suivante…
Avez-vous déjà remarqué à quel point le plastique s’immisce dans notre cuisine? Contenants réutilisables, vaisselle pour enfants, spatules, planches à découper… D’ailleurs, une étude de 2023 a démontré que ces dernières sont particulièrement coupables de libérer des fragments de plastique à chaque utilisation. On comprend bien que la situation empire si la planche est déjà bien usée et égratignée.
Alors, si votre planche à découper a l’air de ça, il est temps de s’en départir!
Solutions : En cuisine, adoptez le verre, la céramique, le bois ou l’acier inoxydable. Dans le cas de la pellicule plastique, d’autres options pour emballer et couvrir ses plats incluent le papier d’aluminium et la cire d’emballage réutilisable.
Certes, ces matériaux alternatifs reviennent souvent plus chers à l’achat, mais ils sont aussi généralement plus durables, sans compter qu’ils affectent moins notre santé.
De même, remplacer ses outils culinaires en plastique n’a pas à être bien cher : les friperies et les plateformes virtuelles de vente d’occasion sont des ressources à considérer avant de débourser pour du neuf.
Solutions allégées : Vous avez une collection de contenants en plastique dont vous ne souhaitez pas vous départir? Quelques trucs :
Vos ustensiles de cuisine (spatule, louche, etc.) sont en plastique? Ne les laissez pas reposer dans la casserole remplie de bouffe chaude.
Les bouteilles jetables libèrent des particules de plastique dans l’eau au fil du temps : en moyenne, 240 000 particules de nano et microplastiques se retrouvent dans un litre d'eau embouteillée, selon une étude de 2024 de l’Université Columbia à New York.
Évidemment, ce conseil ne se limite pas à l’eau : n’importe quel breuvage vendu dans du plastique est sujet au même problème (boissons gazeuses, jus, eaux vitaminées).
Alors, la solution, c’est de trimballer son eau dans une bouteille réutilisable? Oui, mais il y a un mais. En 2022, des chimistes de l’Université de Copenhague ont découvert que les bouteilles en plastique réutilisables libèrent des centaines de substances chimiques dans l’eau qu’elles contiennent, comme du DEET (oui, la même chose qui rend le chasse-moustiques efficace).
Après un cycle au lave-vaisselle, le nombre de substances contenues dans l’eau a bondi de 400 à plus de 3 500, incluant des perturbateurs endocriniens, c’est-à-dire des composés qui altèrent l’activité hormonale. Et ce, même après des rinçages additionnels. Pour réitérer un point mentionné plus haut, le plastique ne doit pas être mélangé à la chaleur (du lave-vaisselle, par exemple).
Ok, ok, mais si ma gourde indique être sans BPA, c’est correct? Encore une fois, ce n’est pas si évident.
Suite à plusieurs dizaines d’études montrant que le BPA (ou bisphénol A, un composé chimique utilisé pour durcir certains plastiques) pouvait perturber les hormones et augmenter les risques d’infertilité, d’inflammation chronique et de maladies cardiaques, une crainte généralisée s’est installée dans le public. En réponse, les fabricants ont sorti des produits portant fièrement la mention « sans BPA » pour rassurer les consommateurs.
Cependant, il faut se rappeler qu’on ne peut pas tout bonnement retirer une composante d’un produit; il faut la remplacer par autre chose.
Entrent en scène le BPS (en majorité), le BPZ, le BPF, le BPP, le BPAF et le BHPF. Ces substances présentent des structures chimiques proches du BPA, ce qui revient à échanger un problème pour un autre; leurs effets sur la santé sont similaires, voire pires.
Tout ça pour dire que le fameux « sans BPA » est une fausse solution et qu’il vaut mieux simplement considérer des options sans plastique.
Solutions : Optez pour une bouteille réutilisable en acier inoxydable ou en verre, à remplir d’eau du robinet, idéalement filtrée si possible.
Solutions allégées : Si vous devez boire de l’eau en bouteille, limitez l’exposition de celle-ci à la chaleur (par exemple, en ne la laissant pas dans l’auto en été) et ne réutilisez pas la bouteille après en avoir bu son contenu.
Si vous utilisez une gourde réutilisable en plastique, lavez-la à la main avec de l’eau tiède et non chaude ou bouillante. Évitez de l’exposer à de hautes températures en n’y versant que des liquides froids ou à la température pièce.
L'acier inoxydable et le verre sont de bons choix de matériaux pour les bouteilles réutilisables.
Utiliser une tasse réutilisable pour le transport d’un café à emporter n’est pas seulement bénéfique pour l’environnement.
Quoique cet argument soit d’une grande pertinence (imaginez le nombre de gobelets, accompagnés de leur couvercle en plastique, jetés chaque jour), un autre avantage de la tasse réutilisable s’impose : elle est meilleure pour notre santé.
En effet, malgré leur apparence, les gobelets de café à usage unique ne sont pas faits uniquement de carton. Leur intérieur est revêtu d’une mince couche de plastique, comme le polyéthylène (PET) ou l’acide polylactique (PLA), qui empêche leur contenu de fuir.
Au contact d’un liquide chaud, comme du café ou du thé, une partie de ce revêtement de plastique s’échappe, vous l’aurez deviné, dans le breuvage ensuite ingéré.
Ce n’est pas que de la supposition; cet effet a été démontré dans de récentes études, soulignant encore une fois que le plastique s’invite dans nos corps de plusieurs manières insoupçonnées.
PS : pour brasser du lait, de la crème ou du sucre dans le café, privilégiez une cuillère en métal ou un bâton en bois plutôt qu’une cuillère en plastique.
Solution : Comme mentionné précédemment, apportez avec vous une tasse thermos réutilisable (pas en plastique) pour boire votre café lors de vos déplacements.
Solutions allégées : Si vous n’avez pas de tasse réutilisable, considérez ces deux options :
Avez-vous le temps de vous asseoir au café pour boire votre breuvage dans une tasse en céramique? Si oui, prenez-le sur place.
Si non, retirez au moins le couvercle de plastique du gobelet, qui entre en contact avec le liquide chaud juste avant la consommation de la boisson.
Sans surprise, les aliments entiers, qui peuvent être considérés comme un ingrédient, sont largement reconnus comme étant meilleurs pour la santé que les produits ultra-transformés. Non seulement ces derniers sont-ils peu nutritifs et pro-inflammatoires, mais ils contiennent aussi plus de traces de plastique!
En effet, deux études, (l’une datant de 2014 et l’autre de 2024) ont mis en lumière que la consommation de produits ultra-transformés est associée à de plus hauts taux de taux de phtalates dans l’urine. Les phtalates sont des substances chimiques utilisées pour assouplir le plastique.
Selon l’Institut de cardiologie de Montréal, des preuves solides indiquent que l’exposition aux phtalates est associée à des effets négatifs sur le neurodéveloppement, en particulier chez l’enfant. Des preuves de niveau modéré mentionnent que les phtalates pourraient être liés à un risque accru de diabète de type 2, d’endométriose et de faibles niveaux de testostérone.
Les produits ultra-transformés contiennent significativement plus de plastiques que les aliments peu ou pas transformés.
Ces produits ultra-transformés dont il est question englobent tous les produits créés en usine, vendus dans un emballage et affichant habituellement une longue liste d’ingrédients avec des additifs. Ils sont souvent riches en gras, en sel et/ou en sucre, par exemple les :
Solution : Ce n’est rien de nouveau, une alimentation majoritairement composée d’aliments frais est préférable. La bonne nouvelle, c’est que plusieurs aliments communs, comme les sucettes glacées ou le granola, sont surprenamment faciles à préparer à la maison.
Solutions allégées :
Si les aliments transformés vous dépannent par manque de ressources (temps, espace d’entreposage des ingrédients, cuisine adaptée, etc.), tentez d’acheter des produits avec une liste d’ingrédients plus courte et/ou moins mystérieuse.
Identifiez quels produits transformés sont les plus courants dans votre alimentation et essayez de trouver des solutions réalistes pour en diminuer votre consommation.
Par exemple, si la pizza congelée constitue un souper qui dépanne trois fois par semaine, pourriez-vous opter pour une version maison facile un soir par semaine? Avec un pain plat (naan ou pita) et du fromage râpé stockés au congélateur, on peut y ajouter des restants au choix (sauce blanche ou à la tomate, pesto, légumes, poulet…) avant d’enfourner le tout pour une dizaine de minutes.
Comme mentionné ci-haut, une partie de notre exposition aux microplastiques provient des emballages qui entrent en contact avec la nourriture, par exemple les sacs de plastique à usage unique utilisés pour emballer les fruits et légumes.
Il faut porter une attention particulière aux aliments gras qui sont dans des contenants en plastique (beurre d’arachides, huile, lait, yogourt, fromage, etc.), car diverses études démontrent que les phtalates s’échappent encore plus dans les lipides.
Une partie de notre exposition aux microplastiques provient des emballages qui entrent en contact avec la nourriture.
Même chose pour le thé et la tisane : malgré qu'ils offrent des bienfaits médicinaux, les sachets dans lesquels ils sont vendus résultent souvent en une infusion de plastique – environ 14.7 milliards de particules par tasse, selon une étude de l’Université McGill. On préfère donc le thé et la tisane en feuilles libres que l’on infuse dans une cafetière à piston ou un infuseur à thé en métal.
Solutions : À l’épicerie, amenez vos propres sacs et contenants pour les fruits, les légumes et la viande ainsi que pour les denrées sèches en vrac (noix, graines, légumineuses, etc.).
Dans la mesure du possible, tentez d’éviter les fruits et légumes avec des autocollants dessus, comme les pommes.
Le simple fait de rincer abondamment le riz avant la cuisson permet de réduire sa teneur en microplastiques de 20 à 40 %, selon une étude de l’université de Queensland, en Australie. Cette recherche indique qu’une seule portion de riz peut contenir 3 à 4 mg de plastique. Cet apport peut augmenter de 400 % dans le riz instantané (pré-cuit).
Solution : Préférez le riz régulier au riz instantané et rincez-le sans ménager avant de le cuire.
Les poêles anti-adhésives, en particulier si elles sont abîmées ou chauffées à hautes températures, peuvent libérer des microplastiques dans les aliments.
Une étude australienne a trouvé qu’une seule petite fissure sur une poêle recouverte de Téflon (un anti-adhésif répandu) peut libérer environ 9 100 particules de plastique à elle seule. Ce n’est pas tout; ce même revêtement échappe aussi des PFAS, des « produits chimiques éternels » (forever chemicals) dont les risques pour la santé sont peu reluisants : perturbation des systèmes immunitaire, nerveux et reproductif, entre autres.
Solution : Utilisez des poêles et des casseroles faites d’acier ou de fonte. Fouinez les friperies, les ventes de garage et les plateformes de vente d’occasion pour dénicher des produits usagés, plus abordables.
Solution allégée : Si vous n'avez pas d’alternative aux poêles anti-adhésives, évitez de les chauffer à des températures élevées (utilisez le feu moyen) et surveillez les signes d'usure. Pour ne pas les égratigner, lavez-les doucement et n’utilisez pas d’ustensiles en métal pour mélanger ou servir la nourriture depuis la poêle.
C’est beaucoup de contenu à digérer, tout ça, j’en conviens. Je tiens surtout à terminer avec un rappel de nos privilèges. Changer ses habitudes pour réduire sa consommation de microplastiques est une belle intention, mais gardons à l’esprit que ces astuces ne sont pas accessibles à tout le monde.
Par exemple, l’accès à l’eau potable reste un luxe pour plusieurs, relayant l’eau embouteillée au rang de nécessité. Cette triste situation n’est pas confinée seulement aux pays éloignés. Ici-même, au Québec et au Canada, de nombreuses communautés issues des Premières Nations font face à une crise d’eau potable.
De même, en situation d’insécurité alimentaire, l’achat en vrac n’est pas une priorité. L’essentiel est de se nourrir, peu importe l’emballage dans lequel vient la nourriture.
Bref, l’idée n’est pas d’atteindre la perfection, mais de faire ce qui est à notre portée, selon nos moyens et notre réalité.
Rappelons-nous que personne ne peut complètement éviter les microplastiques : mieux vaut donc adopter des gestes adaptés à ses circonstances individuelles, sans s’empêcher de dormir non plus. Chaque effort compte et ça ne peut pas nuire de commencer là où l’on peut.
En terminant, pour aller au-delà de l’alimentation, voici quelques astuces supplémentaires pour limiter son exposition aux microplastiques :
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