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Témoignages

Ces femmes qui pratiquent un métier traditionnellement masculin : deux témoignages

Elles sont est un balado original de Noovo Moi qui donne la parole à des personnes ayant pour point commun d'avoir des parcours atypiques et parfois souffrants. Cet article se veut un complément de l'épisode 7 et concerne les femmes qui œuvrent dans des métiers traditionnellement masculins.

Merci infiniment à l'animatrice Mélissa Bédard et à ses deux invitées, Emna Achour et Sandrine Ouellet.

Emna est une ancienne journaliste sportive et désormais humoriste, amenant donc une double expérience dans des milieux à prédominance masculine, et Sandrine est menuisière-charpentière dans le domaine de la construction, plus particulièrement en coffrage commercial.

Ont-elles choisi des métiers « d’homme » spécifiquement pour briser des stéréotypes?

Sandrine, avant, était mannequin et figurante. Elle n’a donc vraiment pas le « physique de l’emploi » qu’on s’attend pour travailler en construction! Ses parents pratiquaient des métiers traditionnels, mais toute petite elle aimait jouer dans le garage avec son père mécanicien.

Elle est manuelle et elle a un TDAH, ce qui fait qu’elle a réellement besoin de bouger. Lorsqu’est venu le temps de choisir une carrière, elle n’est pas allée d’emblée dans ce domaine puisqu’elle croyait que comme femme, ce n’était pas pour elle. Depuis qu’elle a développé ses compétences, elle a toujours foncé sans que ce soit une volonté délibérée de se prouver. Elle s’est souvent fait dire que son métier était physiquement très difficile, mais elle réussit en misant sur sa débrouillardise et son côté fonceur, plutôt que strictement que sur son physique.

Emma, quant à elle, s’est déjà fait dire qu’elle avait un « fétiche pour les boys club! » Mais elle n’a jamais pris la décision consciente de travailler dans des milieux d’homme, elle a simplement suivi ses goûts et ses envies. Par contre, elle a toujours été motivée de prouver qu’elle était capable de réussir dans ces milieux moins typiques pour une femme; plus on lui mentionnait et plus elle devenait déterminée.

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Qu’est-ce qui est a été difficile en tant que femme qui pratique un métier d’homme?

Les deux femmes expriment d’abord le même point négatif : le fait de ne pas se faire prendre au sérieux.

Sandrine, qui travaille dans un milieu plus physique, en a vu de toutes couleurs : allant des commentaires déplacées, aux allusions sexuelles, aux blagues de très mauvais goût et même au dévoilement de son numéro de téléphone sur un chantier, contre son gré. Elle a de plus vécu du harcèlement et a déjà refusé les avances de son patron, qui lui a ensuite fait subir un enfer durant ses journées de travail.

De plus, elle déplore le fait qu’avant de se faire engager, elle a dû prouver sa compétence de manière très pointue (montrer qu’elle pouvait poser un clou, transporter son matériel, effectuer certaines coupes) tandis que les hommes n’avaient jamais à le faire.

Emna a elle aussi subi un double standard dans son traitement au travail. Avant son embauche, elle a été la seule journaliste qui a dû passer un test, avec des questions assez insultantes, du type: « Qui est le capitaine des Canadiens? ») Elle a trouvé épuisant à la longue le fait de toujours se faire remettre en question, de ne jamais être crue sur le champ. Elle affirme que dans le vestiaire des Canadiens, ce n’étaient jamais les joueurs qui posaient des difficultés, mais plutôt ses collègues.

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Renverser la responsabilité

Emna a fini par quitter le journalisme sportif ; la relation avec son patron et ses collègues (un en particulier) étaient devenues trop difficiles. Elle était au bord de la dépression et ne trouvait plus que ces difficultés constantes valaient la peine. Dans le milieu de l’humour, elle amène son expérience de vie et son bagage de 10 ans dans un (autre) milieu d’hommes. Toutefois, sa réflexion est « au lieu de donner des outils aux filles pour que ça se passe bien, est-ce qu’on ne pourrait pas faire pour que les hommes se conduisent mieux? »

Sandrine a fini par faire sa place et elle commande le respect de son équipe. Elle se sent bien et elle adore son métier mais a dû passer à travers plusieurs changements d’emploi ainsi que de soirées à revenir à la maison en pleurs.

Elle souhaite que les filles en construction aient le moins possible à vivre ce qu’elle a vécu. « Ces difficultés peuvent tuer l’estime de soi, » explique-t-elle, ce à quoi Emna ajoute « et peuvent tuer une passion, en plus ».

Certains hommes auraient bien besoin d’un peu plus d’introspection, croit Emna, et il est normal qu’en ce moment il y ait un retour du balancier, nécessaire pour rééquilibrer les choses à plus long terme.

Une note sur Elles sont

Elles sont est un projet qui nous a énormément tenu à cœur comme équipe éditoriale, parce que nous considérons que ce sont des réalités difficiles, mais qu'il demeure nécessaire d'en parler.

Depuis le début du projet, et avant même sa réalisation, nous l’avons porté avec amour et espoir. Mais même en sachant à quoi nous attendre, nous avons été renversées par la puissance des épisodes. Ceci est dû d’une part à l’animation si fine, sensible, empathique et intelligente de Mélissa Bédard. Nous n’aurions pas pu choisir une meilleure personne pour piloter ce projet particulier! Mais c’est également dû aux personnes invitées si pertinentes, éloquentes et attachantes, qu’on aurait toutes envie de prendre dans nos bras. Loin d’être des victimes, elles présentent chacune à leur façon un modèle de courage et de résilience.

Elles sont est une série magistrale, que tout le monde devrait écouter sans faute et dont nous sommes extrêmement fières.